Peniche-Cascais
Il est 13 heures lorsque nous sommes prêts à partir. Une première incertitude est levée, en même temps que l’ancre: Celle-ci ne s’était pas coincée dans aucun débris. Seule une bonne quantité d’hydrocarbure remontant à la surface lorsque nous extirpons notre ancre de l’épaisse vase qui tapisse le fond du port témoigne de la propreté des lieux. Nettoyer l’ancre charge d’une cinquantaine de kilos de vase n’est quand même pas une mince affaire. Aussitôt la digue du port franchie, nous établissons les voiles au plus vite: Depuis que nous naviguons ensemble, nous avons toujours essayé d’éteindre au plus vite le moteur. Sur un voilier c’est toujours un moment spécial lorsque celui-ci se tait et les voiles, alors gonflées par le vent, cessent de claquer. Aujourd’hui, c’est aussi un moment de vérité: Avons-nous assez d’air pour avancer correctement au portant ? Est-ce que la houle va nous aider ou nous incommoder ? Certes, le vent est beaucoup plus présent que ce matin grâce à un effet thermique, mais on est loin de cette belle brise puissante qui nous avait poussés jusqu’ici. Pour tout dire, notre trace pendant les deux premières heures semble bien erratique: On essaye d’aller un peu plus au large chercher le vent – Mauvaise pioche. On s’oriente vent arrière et mer arrière – Encore une mauvaise pioche. Le peu de vent qu’il y a aujourd’hui semble être à la cote. Par ce vent très léger, il nous reste un joker, que nous aurions dû sortir plus tôt: Le spinnaker. Après une bonne demi-heure d’installation, nous voilà sous spi et nous commençons à bouger de manière satisfaisante. Cependant, nous ne pouvons être sur une route directe car le spinnaker asymétrique que nous avons à bord ne fonctionne pas au plein vent arrière, il faut être, par vent faible, à moins de 150 degrés du vent. Sans rentrer dans des cours d’aérodynamique, on génère son propre vent en avançant. Cette composante est loin d’être négligeable par vent faible. Bref, nous avons tout de même 70 miles nautiques à parcourir, soit une douzaine d’heure a 6 nœuds, vitesse que nous sommes loin d’atteindre pour le moment. Pendant que nous tirons un long bord de largue vers la cote a environ 5 nœuds, je cherche sur la carte un plan B. Seul un petit port sur cette cote abrupte pourrai éventuellement nous servir d’abri. Et encore, ça n’est pas sur car le guide, vieux de 15 ans, mentionne que le brise-lames en fort mauvais état ne protège à peu près pas de la houle et des morceaux qui s’en sont détaches constituent de nombreux récifs dans la zone abritée. Vraiment pas idéal. Heureusement, Éole, via son émissaire le spinnaker, nous sortira de ces tourments: En se rapprochant de la cote, la vitesse augmente et nous filons bientôt à 5.5 puis 6.5 voire 7 à 8 nœuds par 8 à 10 nœuds de vent apparent. C’est magnifique et très doux. J’en profite pour en filmer quelques séquences avec la GoPro, que vous découvrirez sous peu sur le blog. A 2 miles nautiques de la cote, nous empannons. La manœuvre consiste à rentrer le spi dans sa chaussette, positionner ce long tube de toile de 20 mètres sur l’autre bord, empanner la grand-voile et finalement redéployer le spi sur la nouvelle amure. Dans un premier temps, nous peinons a retrouver notre vitesse car ayant désormais la houle avec nous, les accélérations et décélérations du bateau sur les vagues perturbent constamment le spi qui peine à rester gonfler. Heureusement, Éole remet un peu de charbon dans la machine et les quelques nœuds de vent supplémentaires qui nous manquaient viennent après une heure. Nous filons à nouveau à 7 ou 8 nœuds vers le Cabo da Roca derrière lequel se trouve Cascais. Nous atteignons ses abords à la nuit tombante, vers 20h30. Le paysage est impressionnant: Cet immense cap, haut de plus de 300 mètres, gris sombre, a moitie voile de gros nuages gris accroches a ses flancs nous accueille avec un vent fraichissant tranquillement mais surement. Étant de surcroit à la nuit tombante, je ne prends pas de chance et, dès que l’anémomètre nous indique presque 20 nœuds de vent, nous rangeons rapidement le spi. Il était temps: 10 minutes plus tard, l’anémomètre indiquera 30 nœuds. C’est le monde à l’envers. Probablement un effet local car aucune prévision météo ne laissait envisager ce scenario. Nous devons rapidement réduire la voilure. On enroule le génois par 2 fois, on prend un ris lors que le bateau surfe a plus de 9 nœuds. 15 minutes après la fin des manœuvres, le vent retombe pour nous abandonner complétement, une fois à l’abri derrière le cap. Nous ferons les 4 derniers miles au moteur alors qu’une douce chaleur nous enveloppe. C’est la première fois que nous ressentons un peu de chaleur sur l’eau la nuit. Rapidement, nous arrivons au mouillage dans la baie de Cascais. Ici, hors de question d’aller au port ou les tarifs dépassent facilement les 100 euros la nuit ! Nous rejoignons un gros groupe de bateaux au mouillage devant la plage. De nuit, nous jouons la prudence et restons à une distance respectable des feux de mouillage avoisinants. Il est 22 h seulement et nous sommes tous 2 très fiers de la manière dont nous avons gérer cette navigation délicate. Quant aux filles, elles se sont organisées comme si on dormait en mer: Eléa a rejoint sa sœur avec couette et oreiller dans sa cabine (elle nous laisse sa cabine pour dormir en mer à l’arrière lorsque nous naviguons de nuit). Phoebe l’a endormie en lui chantant des chansons. C’est super mignon.
Cascais (25 septembre – 2 Octobre 2015)
Vendredi matin. C’est sous un gros soleil estival que nous découvrons la station balnéaire réputée et huppée. Avec sa voisine Estoril, Cascais est la station balnéaire la plus proche de Lisbonne. Après un déjeuner sous le soleil, nous allons nous ancrer beaucoup plus près de la plage, à proximité de Sula. On ne se quitte plus ! Nous apprendrons plus tard qu’ils ont tout fait au moteur, étant partis plus tôt et leur bateau étant beaucoup plus lourd et donc moins rapide que le nôtre. Nous prenons l’après-midi relax. L’ambiance vacances et la chaleur qui règnent ici nous y pousse. On gonfle le Paddle Board et on part à la plage en y emmenant la petite Beatrice. Ces parents, eux, sont charges de trouver la laverie (là, ça devient urgent…). Sur la plage, les filles s’amusent comme des folles avec un petit coin de sables mouvants ! C’est très bizarre mais on s’y enfonce jusqu’aux hanches. La petite plage est pleine de touristes étrangers, dont certains se désaltèrent (??) bruyamment à la vodka pure. Ça sent le party ici….En fin de journée, Lucia et Peter reviennent bredouilles. Ils n’ont pas trouvé de laverie automatique. Damned ! Nous leur rendons malgré tout leur fille et partons prendre l’apéro sur le bateau. Le soir, nous nous endormirons au bruit des ultra-basses qui sortent des bars avoisinants. Ils sont nombreux le long du bord de mer….
Samedi matin, je découvre grâce à ma super antenne wifi que je perche dans le mat qu’un des bars du coin a été bien peu créatif pour protéger son réseau wifi: Même mot de passe que le nom du réseau. Tant mieux, nous pouvons du bateau mettre à jour le blog, télécharger des documents du CNED et accéder au Dieu Google qui nous ouvre rapidement les portes de la propreté retrouvée en nous indiquant une laverie automatique située a une 20aine de minutes d’ici. Ce samedi sera donc une journée de corvées avec une bonne marche vers la laverie que nous trouvons avec un peu de chance. Elle offre un accès wifi bien pratique. J’y attends pendant que les filles se dirigent vers le supermarché. De ce cote, nous sommes servis: Juste en arrière de la plage se situe un immense supermarché très bien achalande, certainement à cause de la clientèle très internationale de l’endroit. Faute de carte VISA, nous retirons le maximum de liquide possible et remplissons tous nos sacs de provisions en tout genre. Le but étant de profiter de cet hypermarché pour ne pas avoir à refaire de grosses courses lors de nos prochaines étapes. Ca sera certainement plus cher, plus loin et plus pénible sur les iles atlantiques vers lesquelles nous nous dirigeons. Avec 25 kilos de linge mouillé et certainement le double en provisions, nous n’avons d’autres choix que de retourner au dinghy avec le chariot de supermarché. Au Portugal, il semble que tous les trottoirs et rues piétonnes soient paves de petits paves blancs. Certes très élégants, mais très bruyants avec un chariot de supermarché ! Notre passage dans les ruelles piétonnes ultra touristiques (et quelque peu chics) sera peu discret. Avec nos enfants eux aussi chargés comme des mules, nous avons vraiment l’air de romanos. De retour au bateau, le rangement de toutes ces victuailles prend un certain temps. C’est Phoebé, comme certains pourront facilement l’imaginer, qui dirige les opérations: Ce matin au réveil, elle a mobilisé sa sœur pour effectuer un inventaire complet de tous les coffres a nourriture. Nous rangeons sous sa gouverne alors qu’elle met consciencieusement à jour les quantités de boites de conserves, biscuits, légumes secs etc. que nous empilons dans le ventre de Korrigan. L’après-midi caniculaire se passe tranquillement à bord entre repos et ballades en paddle board. Phoebe a l’air de beaucoup aimer cela et emmène sa petite sœur. Elles prennent bien garde de en pas tomber car les méduses sont ici nombreuses et très grosses. Par contre, l’eau n’est toujours pas très chaude et le thermomètre ne dépasse pas les 16 ou 17 degrés… Si, si, je suis sûr qu’on va se baigner un jour….
Dimanche est encore une journée tranquille. Nous avons grand besoin de relaxer car nous avons avance pas mal vite ces derniers jours et les visites de Porto et Obidos nous ont laissé peu de temps pour décompresser. Nous ne sentons pas encore prêts à visiter une grande ville comme Lisbonne. Pourtant, nous devrons y aller pour demander nos visas à l’ambassade du Cap Vert. Ceux-ci sont requis depuis quelques années et la procédure peut prendre du temps. En faisant ca sur place, ça nous contraindrai à rester pendant plusieurs jours a proximité de la capitale. Ça risque d’être plus ou moins agréable…. Nos amis de Sula nous proposent d’aller visiter Sintra le lendemain, lundi. Nous acceptons avec plaisir: L’expérience a été réussie à Obidos plus tôt cette semaine. Nous planifions donc notre visite à Lisbonne pour le mardi. Ces 2 journées de visite seront relatées dans le prochain article.
Mais revenons à Cascais que nous aurons le temps de parcourir car nous ne partirons pas d’ici avant vendredi car chaque mise à jour météo nous retient un peu plus ici : Cascais est fort belle mais très touristique. Cette station balnéaire a une réputation internationale qui a tout d’abord attire une clientèle fortunée, puis, le voyage se démocratisant, un peu tout le monde en quête de soleil et d’ambiance festive. En effet, ici les restaurants, bars et boites de nuit font légion. Il y a d’ailleurs tellement de restaurants qu’on ne peut pas passer devant sans se faire interpeller par un rabatteur qui attend, menu multilingue sous le bras, tout bipède n’ayant pas l’air local. Ceci dit, le centre est très beau et est fait de rues pavées de ces fameux petits paves blancs et noirs disposes en mosaïques variées. Les maisons sont colorées et élégantes. Plusieurs petits manoirs se dressent en front de mer. Cascais a aussi évidemment son centre de congrès, des grands hôtels, un casino, etc. La ville attire aussi de nombreux évènements sportifs: Des étapes promotionnelles des nouveaux bateaux de l’America’s Cup ainsi qu’une manche de la Louis Vuitton’s Cup y ont été disputées dans les dernières années. Pendant notre présence, nous assisteront à un triathlon dont le départ a été donne sous nos yeux, tôt dimanche matin ainsi qu’à un championnat du monde de voile (les RC44, magnifiques joujoux de milliardaires faits de 44 pieds de carbone et de haute technologie). La marina quant à elle, ne donne pas trop envie: Sorte de ghettos pour riches: un peu excentrée et trop vide, il y flotte comme un malaise. Certes, quelques yachtmen fortunes ou hommes d’affaires y dinent dans les trop nombreux restaurants, mais la politique de prix ultra-chère paralyse un peu l’endroit: La preuve, tout le monde mouille a l’extérieur du port, y compris quelques yachts d’une taille respectable.
Plus tard dans la semaine, nous aurons l’occasion de nous promener dans le « vieux » Cascais. Les mêmes petites rues, les mêmes maisons pleines de charme, mais moins pimpantes, et avec des « vrais » gens qui y vivent. C’est très agréable de s’y perdre. A ce jeu, nous découvrirons un magnifique parc. Les Portugais semblent exceller dans ce domaine: Loin des jardins a la française ou à l’anglaise ou chaque branche ou feuille qui dépasse ne peut échapper au châtiment suprême, les parcs portugais laisse la nature s’exprimer à travers une subtile organisation de l’espace et des espèces. Y compris les espèces animales: En effet, dans ce parc on y trouve en liberté, poules, coq, canards, oies et paons. C’est drôle, le soir venu, de voir les poules s’envoler vers les arbres les plus proches et y nicher pour la nuit. Et oui, les « vraies » poules, ça vole (un peu). Les filles s’amusent à regarder Les gallinacées évoluer sur le gazon devant une sculpture moderne ou un petit bar lounge très sympathique. On y trouve aussi un vaste parc de jeux pour enfants, au milieu d’une petit boise d’Eucalyptus. Une place a aussi été réservée aux « sports » avec des terrains de pétanque et autres jeux similaires que nous ne connaissons pas, abrites du soleil sous la frondaison des arbres. Nous profitons de ce bel endroit serein et de sa douce lumière pour faire des portraits de famille. La visite se termine en découvrant un petit château aux couleurs chatoyantes et entoure d’eau: Nous sommes arrivés sur la corniche, face à la mer. Sur la corniche se trouve aussi un magnifique hôtel. Alors qu’avec Daphné nous rêvons un peu devant une alléchante formule gastronomique et suite avec vue sur la mer, les filles nous demandent ce qu’est un hôtel. Après quelques explications, Eléa décrète qu’elle rêverait de vivre à l’hôtel, pour 2 bonnes raisons: Quelqu’un range notre chambre et le matin, le déjeuner est à volonté ! Phoebe semble aussi ébahie devant le luxe qu’offre l’hôtel, nous questionne sur le nombre maximum d’Etoiles alors que la perspective du retour au bateau dans notre annexe qui prend l’eau la guette….La mise en perspective du budget pour vivre à l’hôtel versus voyager en bateau les ramènent a la réalité. Finalement, ce ne seront que les « Lego Friends » qui, demain, iront à l’hôtel.
superbe!! sachez qu’en Guadeloupe aussi les poules dorment dans les arbres……..et celles de nos voisins ont apparemment décrété que nos arbres sont mieux que les leurs! Bon vent pour la suite!
merci de nous faire voyager et rêver.
Bon vent aussi pour la suite en attendant la suite !
L’aventure c’est l’aventure , je revis quelques débrouillardises que nous avons vécues en Guinée .. mais nous n’vison pas internet …
Merci de ces splendides récits . Bon vent et prudence ..
Grosses bises .
Encore de magnifiques photos!
Et si les poules dorment aussi dans les arbres en Guadeloupe,elles doivent être réveillées à 2 h du matin par les coqs!!!!!