26 Novembre – Santa Luzia
Nous quittons le mouillage de Tarrafal en fin de matinée pour nous rendre sur la petite île de Santa Luzia. Cette petite île est inhabitée et semble très agréable à plusieurs égards : kite sur la grande plage du Sud, snorkelling ou pêche sous-marine, ballade sur l’île. C’est pour cela que nous comptons y passer au moins 2 jours avant de nous rendre à Mindelo où notre principale activité sera de préparer la transat. Pour la première fois depuis bien longtemps, le vent est bien faible lorsque nous quittons le mouillage. Nous devons faire quelques bords de près pour déborder la pointe Ouest de Sao Nicolau et ensuite nous diriger vers Santa Luzia en passant à travers une zone de haut-fonds. Pendant que nous peinons à nous extirper de Sao Nicolau dans un vent asthmatique nous croisons un groupe de globicéphales (ou baleine-pilotes). Ces gros mammifères sont très impressionnants mais sont inoffensifs et nagent tranquillement en groupe. Charles est chanceux de voir ces animaux après seulement quelques minutes de navigation ! La prochaine heure sera beaucoup moins drôle car nous nous retrouvons dans une zone de contre-courants, sans vent qui lève une mer très courte et cassante. Nous arrivons à nous en extirper péniblement après une heure lorsque nous touchons enfin du vent frais, après avoir largement débordé l’extrémité de Sao Nicolau. La houle de Nord-Est, canalisée par les canaux entre les îles génère ici de forts courants sur les zones de haut-fonds que nous traversons. Le vent étant maintenant bien établi, nous filons à bonne vitesse au travers vers notre destination. Vaga, qui a utilisé son moteur pour se déhaler le long des côtes de Sao Nicolau est maintenant bien devant nous. Nous longeons les petites îles de Raso et Branco qui sont pirement volcanique, sans végétation. Le vent forcit tout du long et nous arrivons avec un solide vent de plus de 25 nœuds vers Santa Luzia. C’est avec plaisir que nous apercevons non seulement Vaga mais Tsaelou qui nous devance depuis leur départ de Sal et on choisit de rester un peu plus au mouillage de Santa Luzia pour que nous puissions tous nous retrouver. Même si Vaga est arrivé avec une bonne demi-heure d’avance sur nous, nous constatons qu’ils ne sont pas encore ancrés. Gaël, sur Tsaelou, nous met rapidement au parfum : Il faut trouver les patchs de sable oû s’ancrer et il y a pas mal de courants et de grosse rafales qui descendent de l’île. On comprend mieux pourquoi nos amis cherchent encore où poser leur pioche ! Nous nous en sortirons un peu plus rapidement qu’eux car nous sommes maintenant 3 adultes participant à la manœuvre : Charles nous trouvera en apnée une vraie étendue de sable dans laquelle notre ancre pourra accrocher : En effet, le long de ces îles volcaniques, le fond semble souvent sableux mais est en fait rocheux, recouvert d’une mince couche de sable sur laquelle l’ancre ne peut s’enfoncer. Une fois les grandes manœuvres terminées, les filles partent à la nage rejoindre leurs amis sur Vaga alors que les adultes nagent jusqu’à Tsaelou oû nous retrouvons avec plaisir Gaël et Élisabeth. Ils ont eu beaucoup de plaisir sur l’île entre la chasse sous-marine et les ballades. On a bien hâte d’en faire autant. Outre quelques plaisanciers qui sont ancrés ici, il y a de nombreuses barques de pècheurs qui, le temps de leur campagne de pêche, campent sur l’île. Une barque s’approche et nous proposent des langoustes qu’ils viennent de pécher. Après quelques négociations, nous voilà avec une belle grosse langouste qui nous nourrira facilement à 5. Miam ! Pour ce soir, l’heure est aux retrouvailles car Calico Jack, aussi rencontré à Sal, vient se joindre à nous. Logiquement, toute la bande se retrouve sur Vaga qui peut confortablement nous recevoir dans son immense cockpit. Nous faisons un gros potluck (repas canadien, pour les français) où se mêlent accras, tartare de daurade aux fruits, thon, carottes au cumin, pour le délice des papilles. Évidemment, le tout est bien arrosé de punch local pour fêter les retrouvailles où chacun abonde d’anecdotes sur leurs navigations cap-verdiennes.
27 Novembre – Santa Luzia – Sao Vincente
Couchés tard après cette belle soirée, nous avons le droit à un réveil en fanfare : À peine finit-on notre déjeuner que Vaga lance l’alerte sur la VHF : Les garde-côtes arrivent. Nous n’avons théoriquement pas le droit d’être ici car l’île est une réserve naturelle pour laquelle nous aurions dû faire une demande à Sao Vincente. De surcroît nous avons tous des langoustes achetées à des pêcheurs dont nous ignorons s’ils ont le droit de pêcher en ces eaux. Je vais rencontrer les garde-côtes sur leur bateau, documents du bateau et passeports en main. Je feins l’ignorance en montrant mon document de sortie de Sao Nicolau et j’invoque le fait que j’ai des enfants à bord et que nous n’avions pas le temps de nous rendre jusqu’à Mindelo avant la nuit. Mes explications leur conviennent. De plus, je leur mentionne qu’aucun guide nautique ou cartes que nous avons en notre possession mentionne le fait que l’île est désormais une réserve naturelle. Il me confirme que le changement de statut de l’île est récent et que les procédures pour en demander l’accès ne sont pas encore en place. Les garde-côtes et la représentante de la réserve naturelle sont tous très gentils et aimables, sauf un jeune officier qui veut absolument trouver quelque chose à nous reprocher. Finalement, son supérieur lui demandera de se calmer et aucune pénalité ne nous sera infligée. L’équipage de Calico Jack, aussi venu sur le bateau des garde-côtes se chargera de relayer le message aux autres équipages et peu après, nous décampons tous de ce beau mouillage, sans vraiment avoir pu en profiter. Tant pis. La navigation qui s’en suit vers Mindelo est très pénible : Nous devons passer par un chenal entre les 2 îles dans lequel nous rencontrons un courant phénoménal. Avec Vaga, nous sommes les 2 bateaux les moins performants au près et nous devrons franchir cette zone au moteur car chaque bord que nous tirons nous renvoie à notre point de départ à cause du courant. Tsaelou, petit catamaran plus léger et Calico Jack qui est un quillard s’en sortent presque sans moteur. Ce passage nous prendra quand même un bon 3 ou 4 heures. Le reste de la navigation est beaucoup plus facile car nous longeons la côte au travers avant de piquer vers la baie de Mindelo. Celle-ci, bien que vaste, est encombrée de bateaux en tous genres : Non seulement, il y a de nombreux voiliers en transit mais aussi beaucoup de gros bateaux, pèche ou cargo, plus ou moins en état de naviguer. Le mouillage étant très encombré et venteux, nous trouverons finalement une place après la troisième tentative, juste en avant d’un vieux bateau de pêche chinois en état de délabrement avancé. Le bateau un peu plus loin en arrière n’a guère l’air en meilleur état. Ce soir, nous restons tranquilles à bord après cette journée éprouvante.
28 au 30 Novembre – Mindelo, préparation
Dès le samedi matin, nous passons en mode préparation du bateau. Tout d’abord, les filles s’occupent de faire l’inventaire de nourriture dans les coffres pendant que Daphné compose les menus de la traversée et liste les vivres nécessaires. Avec 6 personnes à bord, il faut prévoir environ 240 portions de nourriture, sans compter les déjeuners et les petits en-cas. Tout un défi de logistique ! Pendant ce temps, Charles et moi-même nettoyons de fond en comble l’extérieur du bateau, couvert de sable rouge depuis que nous sommes au Cap-Vert. Alors que nous nettoyons l’arche et le panneau solaire quelle n’est pas notre surprise lorsque nous voyons le bateau en arrière du bateau chinois couler sous nos yeux ! Ce matin au réveil, il nous semblait bien que ce bateau penchait beaucoup sur l’arrière. Il devait déjà prendre l’eau et a fini par basculer sur le côté. Pendant les 2 ou 3 heures suivantes, il continuera à sombrer. On assiste alors à un ballet incessant de barques de pèche qui viennent récupérer tout ce qui flotte autour de l’épave. L’après-midi, nous allons tous les 5 à terre pour amener un premier batch de linge à laver et repérer les épiceries. Nous commençons l’avitaillement dans l’épicerie la plus proche du port. Certes, l’achalandage est bien supérieur à ce que nous avons vu jusqu’alors au Cap-Vert, mais on est loin des épiceries européennes en taille et en diversité de l’offre. Nous profitons aussi de l’après-midi pour découvrir un peu la ville de Mindelo. Phénomène de ville, pour la première fois depuis que nous sommes au Cap-Vert, nous sommes confrontés à la mendicité. L’empreinte du tourisme sur la ville est visible, en particulier autour de la marina. Celle-ci est très vaste, plusieurs centaines de place, avec un beau bar-restaurant et un petit magasin d’accastillage. Le quartier environnant est très propre et offre même quelques boutiques de luxe le long de l’eau. C’est un peu bizarre au Cap-Vert. Le soir venu, nous retrouvons les équipages des bateaux amis à la marina oû nous buvons un verre avant de nous mettre à la recherche d’un resto. À 14, nous ne trouverons aucun restaurant capable de nous accueillir et nous finirons par manger des pizzas, assez tard, dans un petit resto local. Cependant, les pizzas sont excellentes, certainement à cause de l’influence de tous les italiens qui ont investi dans les commerces touristiques du Cap-Vert.
Dimanche matin, réveil en fanfare : Le vieux bateau chinois est en train de relever son ancre et est maintenant à 5 mètres de notre arrière. Nous nous levons en quatrième vitesse, prêts à bouger car nous ne nous sentons pas très à l’aise avec un si gros bateau en si mauvais état. Finalement ça ne sera pas nécessaire de se déplacer pour le moment car il remonte son ancre et recule pour se placer un peu plus loin dans la baie : Il déménage pour faire de la place à un remorqueur qui tente de déplacer le bateau coulé la veille. Peu après, Charles devient le héros de la journée : Daphné part le matin pour amener un autre sac de linge à laver et se rend compte qu’elle n’a pas le portefeuille sur elle. Après quelques recherches sur le bateau, nous en concluons que les clés sont perdues. Pire que ça, son sac à dos était ouvert pendant tout le trajet en annexe. Comme il faut vider l’annexe et regonfler le plancher avant chaque utilisation, il semble probable que le portefeuille soit tombé à ce moment-là, donc à proximité du bateau. Charles plonge en apnée, retrouve à quelques mètres de l’arrière du bateau la carcasse de la langouste mangée la veille. Comme le vent a un peu tourné, il replonge quelques mètres plus à gauche et ressort victorieux avec le portefeuille. Nous avons eu une chance inouïe et nous exultons ! De plus, il était temps que nous le retrouvions car dans la même minute, un employé du remorqueur vient nous prévenir que nous devons bouger pour faciliter les opérations de remorquage. En réalité, ils n’arriveront pas à le bouger d’un centimètre, ce qui semble peu étonnant. L’après-midi, Claude arrive. Sur un quiproquo, nous mettrons plus de 2 heures à le retrouver sur le quai de la marina ! Nous attendions d’un côté et lui de l’autre. Je commençais sérieusement à me faire du souci quand nous nous sommes trouvés ! Le soir, nous retrouvons tous nos amis pour aller manger dans un restaurant repéré la veille qui avait l’air très sympathique, la Bodegita Mindelo. Ce petit restaurant aux murs entièrement décorés d’écritures et graffitis en tous genres est tenu par Bruno, un cuisinier Guadeloupéen exilé d’abord aux Canaries puis au Cap-Vert. Le pauvre, bien que prévenu (cette fois-ci, nous avions réservé !) est complètement débordé. La majorité de la soirée sera passée à attendre nos plats, à grand renfort de mojitos ! Autant dire que ce fut encore une soirée bien arrosée. L’attente était justifiée car les plats étaient excellents. Ce fut une très belle soirée…et la dernière en compagnie de nos amis au Cap-Vert.
En effet, le lundi matin, quasiment au réveil, la décision est prise : On part demain. En effet, je télécharge les fichiers météo pour l’Atlantique et les prévisions sont bonnes pour quitter le Cap-Vert ces jours-ci, ensuite, le calme plat s’installe sur l’archipel à partir de dimanche. Conclusion, c’est maintenant ou dans 8 ou 10 jours. Partir plus tard compromettrait les retrouvailles en Guadeloupe pour Noël. Résultat, ce matin, c’est branle-bas de combat à bord. Ce n’est pas un vain mot quand on se rappelle la quantité de mojitos ingurgités la veille….Par-dessus le marché, il faudra faire sans Charles aujourd’hui : Le cocktail tourista + lendemain de brosse le met dans un bien triste état dont je passerai les détails…
Au chapitre technique, je priorise les éléments cruciaux pour partir : Changer la pompe hydraulique du pilote automatique et ré-usiner le secteur de barre sur lequel la rotule du pilote a encore pris du jeu. Si le temps le permet, nous finirons le support de planches de kite sur le rouf, ce qui aiderait à libérer la cabine avant. Avec Claude, nous nous mettons à l’ouvrage pendant que Daphné, Charles et les filles partent en ville pour continuer l’avitaillement. Charles est mal en point et reviendra vite fait se coucher. Mauvaise surprise : Nous avions confié le lavage de nos draps à un gars qui traine sur le quai de la marina et offre ses services. Nous nous sommes fait avoir car il nous prend plus que la laverie et le travail n’est pas super bien fait. À déconseiller surtout quand on sait qu’il y a 2 bonnes laveries en ville. L’après-midi, pendant que je laisse Claude s’occuper du secteur de barre, je pars en ville avec Daphné pour faire les formalités de départ auprès de la police maritime et des douanes. Ensuite, nous nous occupons de l’épicerie. Ainsi, il ne nous restera plus que le frais à acheter demain : Fruits, légumes et poisson. Comme rien n’est jamais simple ici, ma carte bancaire décide de ne plus fonctionner aujourd’hui. Nous devons revenir au bateau et utiliser d’autres cartes bancaires. Nous ne sommes pas les seuls à faire de grosses courses à l’épicerie. Les quantités à acheter pour 6 personnes sont impressionnantes. Nous sommes bien contents d’avoir régulièrement augmenté nos stocks à bord, au Portugal, aux Canaries notamment. En fin de journée, je prends juste le temps de débarquer les courses et repars en ville pour prendre quelques photos avec la belle lumière de fin de journée et récupérer le premier chargement de linge laissé à la laverie samedi. Je flâne un peu en ville et j’en profite pour me payer un petit plaisir : Une visite chez le barbier. C’est une petite échope le long du bord de l’eau oû un gars joue de la guitare en attendant sa coupe de cheveux. Pour ma part, je me fais bien tailler la barbe et le barbier en profite pour ajuster ma coupe de cheveux. J’aime ce petit cérémonial que l’on a perdu dans nos sociétés modernes. Il y a dans ce plaisir un mélange de superstition lié au départ et l’envie de profiter encore un peu plus de l’ambiance cap-verdienne qui me manque déjà.
De retour au bateau, j’allume le barbecue car nous nous sommes acheté 3 beaux mérous à griller. Le poisson, accompagné de la Malaguette, la sauce pimentée cap-verdienne est excellent. Ce soir, tout le monde se couche tôt pour récupérer de la soirée de la veille et prendre un peu de repos en prévision du départ. Évidemment, celui-ci reste conditionnel à la confirmation de la fenêtre météo demain et à l’amélioration de l’état de santé de Charles. Pour le moment, il ne garde même pas un verre d’eau et peine à se lever. J’espère ne pas avoir à prendre une décision délicate demain.
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C’est toujours une joie de vous lire et la famille se joint à moi pour vous souhaiter une très bonne et belle année 2016.