Les alizés se sont encore renforcés pendant la nuit et vendredi matin, lorsque nous sommes prêts à partir pour Anegada, l’anémomètre indique déjà 25 nœuds bien établis, au mouillage. Heureusement, la navigation se fera au travers avec, a priori, peu de mer car une très longue barrière de corail s’étend dans le Sud d’ Anegada, quasiment jusqu’à Necker Island. Celle-ci n’émerge pas mais casse la houle. Autant dire que ces lieux ont été le théâtre de nombreux naufrages dans les siècles passés. Nous avons une quinzaine de miles seulement à parcourir mais partons dès 8h30 du matin pour arriver assez tôt et avoir le choix de l’endroit où nous pouvons mouiller. Nous partons avec la grand-voile à 2 ris et la trinquette comme voile d’avant. Ce choix était judicieux car le vent s’est établi dans les 27-30 nœuds tout du long. En arrivant vers Anegada, nous suivons prudemment le chenal car les têtes de corail affleurent la surface des 2 côtés du chenal. Heureusement que celui-ci est balisé par des bouées latérales car il n’est pas au même endroit que ce que notre carte suggérait. Le mouillage de Setting point est pas mal agité en avant du champ de bouées avec le vent qui souffle toujours dans les 30 nœuds. Taïa n’a pas d’autres choix que de mouiller dans cette zone plus remuante car le reste du mouillage est peu profond, alors que Nordic Belle a fait le choix de prendre une bouée (ici aussi, 30 $ la nuit). Quant à nous, dérive relevée, nous nous glissons en arrière du champ de corps-morts et mouillons dans moins de 2 mètres d’eau, au calme. Plus on avance dans notre voyage, plus on est heureux du choix de bateau que nous avons fait. Le faible tirant d’eau nous permet très souvent d’accéder à des mouillages confortables ou peu fréquentés.
Nous terminons la matinée en rejoignant à terre nos amis pour visiter les lieux. La visite est vite faite car à part quelques restaurants le long de la plage, il n’y a absolument rien, presqu’aucune habitation et aucun commerce. Comme les belles plages sont situées de l’autre côté de l’île, nous louons un pick-up pour le lendemain. Le véhicule est assez grand pour emmener les 12 personnes de notre groupe. Cela nous donnera de l’indépendance pour découvrir l’île et coûtera beaucoup moins cher que le taxi. Après une promenade sur la plage, nos amis vont déjeuner dans un restaurant, alors que nous rejoignons notre bord pour le lunch avant de partir avec nos kites vers la pointe située à environ 1 mile en arrière de notre mouillage. Il semble qu’il y ait un spot de kite par là. L’endroit fait un peu penser à Cocoa Point, à Barbuda, avec une belle plage cachée derrière une pointe, garantissant un plan d’eau très plat. Malheureusement, je serai vite déçu car le vent est extrêmement instable, voire quasi-nul proche de la plage, alors qu’il souffle à plus de 25 nœuds une trentaine de mètres plus loin. Même si Anegada est une île très plate, la chaleur que dégage l’île fait monter le vent et le rend très rafaleux. Non loin de là, nous rencontrons Éric et son fils Ulysse, qui vivent sur leur catamaran et viennent de Saint-Martin où Éric est professeur de sport. Il nous indique un bien meilleur spot, sur la côte Nord de l’île où nous devons nous rendre demain avec nos amis. Par contre, le mouillage où il est actuellement (Pomato Point) semble très agréable car désert et à l’abri de la houle. Comme le vent est meilleur au large, Daphné rentre au bateau en annexe avec les filles alors que je reviens vers le mouillage en kite, en tirant de grands bords au large. Je suis impressionné par le nombre de têtes de corail qui émerge ici et là, à n’importe quelle distance du rivage. Ça appelle à la prudence si nous devons venir par ici avec Korrigan: C’est pour cela qu’il ne faut naviguer dans ce genre d’endroits que par temps ensoleillé avec une vigie équipée de lunettes polarisées pour repérer les têtes de corail. Pendant que je kite encore un peu à proximité du bateau, Daphné emmène les filles à bord de Taïa car elles se languissaient déjà de voir leurs amis! Ma session finie, j’arrête en m’asseyant dans l’annexe accrochée à l’arrière du bateau et peux ainsi rentrer tout seul, comme un grand! Je vais ensuite à bord de Taïa récupérer les filles et, accessoirement, boire un verre avec eux.
Samedi matin, nous nous levons tôt en prévision de notre journée d’excursion. Il y a eu de gros grains toute la nuit et ce matin, si le vent est toujours aussi fort que la veille, il fait tout gris et pas très chaud. Nous rejoignons nos amis à terre vers 8h45 pour prendre possession de notre véhicule de location. À peine sommes-nous arrivés à terre qu’un violent grain nous déverse des trombes d’eau dessus. Ça commence bien! Après quelques minutes d’attente, fort heureusement à l’abri de la pluie, une femme arrive au volant de notre gros véhicule. Il s’agit d’un gros pick-up dont la caisse a été aménagée avec 2 bancs pour recevoir 8 à 10 passagers, exactement comme les taxis que nous empruntions au Cap-Vert. C’est parfait pour embarquer les 12 personnes que nous sont ainsi que nos deux kites et le matériel de snorkeling des autres. Torstein (Nordic Belle II) se propose pour conduire au grand plaisir des autres: Ici, on conduit à gauche et comme il y a très peu de circulation sur cette île a peine peuplée, cela requiert pas mal de concentration pour rester du bon côté de la route. Nous nous dirigeons tout d’abord vers une plage située au Nord-Est d’Anegada et a priori réputée pour le snorkeling. En réalité, il y a énormément d’endroits pour aller admirer les fonds marins étant donné que toute la côte Nord de l’île est bordée d’une barrière de corail qui elle-même abrite un lagon rempli de corail. Lorsque nous arrivons à la plage, le temps est encore maussade et personne n’est vraiment tenté d’aller mettre la tête sous l’eau, d’autant plus qu’avec les 25 nœuds de vent qui soufflent sans répit depuis plusieurs jours, le lagon est très agité. Alors que les enfants trouvent des trésors (comprendre par là des morceaux de bois, filets, cordes, etc. échoués sur cette plage au vent) pour construire des cabanes et hamacs, les adultes optent pour une ballade sur la plage. Celle-ci est magnifique, déserte mais jonchée de détritus en provenance d’Amérique du Nord ou même de l’autre côté de l’Atlantique et poussés jusqu’ici par les alizés. C’est la triste réalité de notre mode de consommation que l’on peut observer sur toutes les côtes exposées au vent. Plus surprenant que les multitudes de déchets en plastique en tous genres que nous pouvons observer, une porte d’avion est échouée sur la plage! D’autres débris d’avion plus petits se trouvent un peu plus loin. Au retour de notre promenade, le temps s’est dégagé et le soleil sort. Ça nous encourage à aller profiter un peu du lagon: Tornstein et Ernesto partent faire du snorkeling alors que je gonfle mon kite. Ça n’est vraiment pas le plan d’eau rêvé car les patates de corail sont à moins de 15 cm de la surface et il y en a partout! Cependant devant la plage, il y a un bon gros espace de sable où je peux envoyer de gros sauts au ras de la plage. Au large, je me contente de sauts plus modestes que je suis sûr d’atterrir, sinon la sanction est immédiate avec le corail juste en dessous. Par contre, la vue du corail dans les airs à travers l’eau transparente est sublime! Je m’amuse ainsi un bon 3/4 d’heure avant de passer mon kite à Daphné. C’est la première fois qu’elle utilise mon petit kite, elle qui ne jure que par son 10 m2 qu’elle tient dans quasiment toutes les conditions! Cependant, aujourd’hui, le vent est trop fort. Elle aussi s’amuse bien pendant un moment entre les patates de corail avant que nous décidions de plier bagages pour aller vers la lagune où nous pouvons, a priori, observer des flamands roses. Ensuite, notre destination pour le reste de la journée est la plage de Cow Wreck où se tient un petit restaurant de plage. De surcroît, c’est le spot de kite qu’Éric nous a conseillé la veille: Là-bas, la proportion sable-corail est inversée, au grand bonheur des kite surfeurs. Pendant ce temps, les 3 filles ont construit un beau gros hamac, assez solide pour toutes les 3, alors que les 2 garçons se sont trouvé des lances et épées à la démesure des aventures qu’ils s’inventent. Nous repartons donc sur les chemins de terre battue d’Anegada. Il y a certes peu de routes, mais aucune indication alors que certains chemins sont des culs de sac qui terminent dans des marais d’eau salés après plusieurs kilomètres. Nous passons le long de la grande lagune qui occupe une bonne partie de l’intérieur de l’île et nous arrêtons, à l’affût de flamands roses. Nous serons moins chanceux que Torstein et Michelle lors de leur précédent passage à Anegada où ils avaient pu observer une multitude de flamands. Nous repartons donc en direction de Cow Wreck où nous avons une meilleure assurance de trouver de bonnes bières fraîches et un bon lunch! Cow Wreck est un véritable décor de carte postale: Un resto-bar grand ouvert sur une magnifique plage de sable blanc, longée de cocotiers. Face à nous, le lagon turquoise et translucide s’étale à perte de vue. Il n’y a pas plus d’une dizaine de personnes dans les environs. Bref, un petit bout de paradis où nous passerions volontiers beaucoup plus qu’une après-midi s’il ne fallait pas avoir de véhicule pour se rendre. Nous nous régalons avec de bons burgers ou tacos de daurade grillée avant que Daphné et moi allions gonfler nos kites pour une belle session d’après-midi. Les enfants, eux, s’inventent encore des tonnes de jeux sur la plage, pendant que les autres adultes optent pour une promenade sur l’interminable plage ou tout simplement du farniente devant le resto. Le vent ayant un peu faibli, Daphné kite avec son inséparable 10 m2 alors que moi, je reste avec mon petit kite préféré. Nous nous amusons ainsi toute l’après-midi avant de finir avec une bonne bière fraîche sur la plage, trop dure, la vie. En fin d’après-midi, nous quittons à regret ce petit coin de paradis pour rejoindre Setting Point où nous laissons tout simplement notre voiture devant le seul hôtel du coin et les clés au bar.
Dimanche matin, le vent souffle toujours aussi fort…et c’est Pâques! Phoebé s’inquiétait déjà depuis 2 jours : Comment faire une chasse aux œufs sur une île où il n’y a m6eme pas d’épicerie! Alors, une chocolaterie, n’en parlons pas! Heureusement, Daphné avait prévu le truc à Saint-Martin et la chasse aux œufs a bel et bien eu lieu sur Korrigan. C’est drôle, car même à l’intérieur (pour cause de soleil tropical qui fait fondre les œufs), elles étaient tellement excitées qu’elles ne voyaient pas les œufs à peine cachés! Aujourd’hui, Nordic Belle a choisi de rentrer vers Virgin Gorda ce matin, alors que Taïa et nous préférons rester une journée de plus, mais en changeant de mouillage: Nous voulons essayer le mouillage désert de Pomato Point. Nous passons tout d’abord la matinée à faire de l’eau: Nous produisons chaque semaine 225 litres d’eau en environ 2.5 heures. La production d’eau nécessite de faire tourner le moteur car c’est lui qui entraîne la pompe à haute pression du dessalinisateur. Cette quantité d’eau nous suffit pour environ 8 jours. Faites le calcul, cela fait environ 6 à 7 litres d’eau par jour et par personne….de quoi faire réfléchir face à la surconsommation d’eau que nous avons tous à la maison. Certes, sur le bateau, nous faisons la vaisselle et nous nous lavons à l’eau de mer, l’eau douce ne servant qu’au rinçage. Nous partons donc en fin de matinée vers Pomato Point dans 30 nœuds de vent bien établis mais sous un grand soleil. Nous naviguons avec prudence dans le chenal qui nous a emmenés jusqu’ici avant de bifurquer sur la droite en direction de notre nouveau mouillage. Les patates de corail se repèrent bien avec cette bonne lumière de mi-journée et nous rejoignons Taïa sans encombre en nous mouillant derrière une arête de corail qui nous abrite bien de la faible houle qui atteint cette côte. Après le lunch, les 2 équipages se rejoignent à la plage. Comme il y a 2 jours, ma tentative de kite ici est peu satisfaisante, le vent y est aussi rafaleux et irrégulier. Tant pis, nous en avons bien profité la veille. Aujourd’hui, c’est l’anniversaire d’Ernesto. Pour fêter cela, Natalia a préparé un gâteau ce matin que nous dégustons tous sur la plage alors que Daphné lui offre un beau bracelet en macramé qu’elle a confectionné la veille, pour l’occasion. Ensuite, nous partons tous ramasser du bois sec pour le feu de camp que nous comptons faire ce soir. Par chance, il y a aux alentours de nombreux buissons morts. Le soir venu, nous allumons le feu qui flambe sans problème avec le vent qui souffle toujours aussi solidement. Nous passerons une superbe soirée autour de ce feu, seuls au monde sur cette belle plage. Nous finissons la soirée tous ensemble sur Korrigan autour d’un plat de pâtes, faute d’avoir quoi que ce soit à faire griller sur notre feu de camp.
Lundi matin, nous décidons d’aller visiter le petit récif à côté duquel nous sommes ancrés avant de retourner vers Virgin Gorda. Taïa part directement après le petit déjeuner. Nous partons donc tous les 4 à la nage vers le récif. À peine y sommes-nous arrivés que nous tombons nez à nez avec une énorme langouste, en vive eau! C’est la première fois que nous en voyons une sur le sable, hors de son trou. Nous aurons beau chercher pendant un bon moment sur le reste du récif, nous n’en reverrons pas. Il faut dire qu’avec le vent qui souffle encore assez fort, même si il s’est un peu calmé, la visibilité n’est pas très bonne. Finalement, nous partons après le lunch, vers 13h30. Le vent est établi dans les 20-25 nœuds et nous devons serrer un peu plus le vent qu’à l’aller. Nous prenons un ris et sortons complètement le génois. Ainsi gréé, Korrigan passe avec aisance dans la vague et remonte bien au vent à un bon 6.5 nœuds. Progressivement, le vent tourne en notre faveur et nous pouvons un peu ouvrir les écoutes et filons à 7.5 ou 8 nœuds lorsque nous arrivons dans le Gorda Sound. La marina de Leverick Bay à proximité de laquelle nous attendent nos 2 bateaux-amis est juste en face. Nous l’atteignons rapidement, repérons Taïa mouillé entre la côte et le champ de bouées de mouillage. Nous trouvons un espace libre à proximité et jetons l’ancre ici. Sans trop traîner, nous débarquons pour aller les rejoindre à la marina où les enfants jouent déjà dans la piscine en attendant le spectacle de ce soir que nous venons voir.
Au final, Anegada aura été une très belle surprise. Nous n’avions pas prévu initialement d’aller la visiter et avons beaucoup apprécié. L’endroit est beaucoup moins développé que le reste des Îles Vierges et les plages sont de toute beauté. Dommage que toute pêche soit interdite aux BVI car cela nous aurait peut-être permis d’y séjourner plus longtemps et profiter un peu plus du calme de cette île restée à l’écart du développement touristique.
La photo 11 est un chef d’oeuvre!
Bravo
Je te comprends Olivier. Oui c’est une enorme responsabilite, et tu fais cela tres bien. Ce n’est pas difficile d’imaginer tout les problemes qui peuvent venir avec une telle aventure, mais j’ai vu toute la preparation que vous avez faites, et c’etait bien justifie. Alors je vous souhaite beaucoup de chance pour avoir le moins de problemes possible et pour en profiter au maximum. C’est tres interessant de voir comment tu te sorts des diffiultes et l’energie que tu y mets. Bravo et bonne suite du voyage.
Et bon Anniversaire. Joyeux 40 ans.
Bravo pour les oeufs de Pâques , fallait avoir l’imagination de Daphnée !!!
Bon vent