Après Matthew…
Nous sommes Samedi 1er Octobre et nous devons récupérer mes parents à Bonaire dans moins de 2 semaines. Maintenant que Matthew est passé, il serait temps de partir vers Crasqui, Noronsqui ou une des nombreuses îles de l’archipel, certainement moins fréquentées que Francisqui. Comme la portion navigable et autorisée de l’archipel s’étire dans l’Est de notre position actuelle, donc en descendant le vent, nous ne voulons pas avoir à revenir en arrière contre le vent pour faire nos formalités de sortie. Nous voulons donc faire des sorties anticipées à Gran Roque avant de partir et optimiser le temps qui nous est alloué. Je pars donc avec Laurent, Pauline et Plume à Gran Roque dès le matin. C’est Willy qui nous véhicule et s’occupe aussi de livrer de l’eau sur Maïa. Cool, un problème réglé! Par contre, nous n’aurons pas de succès dans nos démarches pour obtenir notre zarpe dès maintenant. Une nouvelle équipe de garde-côtes a remplacé ceux que nous avions rencontrés et l’ambiance a changé. Notre interlocuteur est en uniforme, pas en short et tee-shirt et le visage strict et fermé du militaire borné. On renonce et on met au point un plan B avec Willy : Celui-ci viendra nous chercher en Lancha a Cayo de Agua la veille de notre départ vers les Aves pour que nous revenions faire nos formalités de sortie. Certes, tout cela a un coût mais nous n’avons guère le choix car nous ne sommes pas à l’aise à naviguer plus de 10 jours dans les eaux Vénézuéliennes sans y être autorisés. Plume et Pauline restent en ville pour se balader et surtout pour attendre que les denrées fraîches soient mises en rayon dans le supermarché. Avec Laurent, nous profitons un peu des rues de Gran Roque, des délicieux empenadas que l’on y mange et de la connexion internet avant de retourner avec Willy à Francisqui. Maïa se fera livrer 400 litres d’eau dans l’après-midi, nous permettant ainsi de partir dès le lendemain matin. Pendant ce temps, avec Daphné, nous faisons connaissance de Patrick, un français vivant au Vénézuela depuis des dizaines d’années et faisant du charter dans les Roques sur son gros catamaran. Il nous confirme à quel point la situation s’est dégradée cette année : Avec les mises en garde de tous les gouvernements sur le Venezuela, il n’a eu quasiment aucun touriste étranger cette année. Idem pour les voiliers, selon lui, il y a eu au maximum une quinzaine de bateaux étrangers qui se sont arrêtés cette année aux Roques. Par contre, il nous parle de la folie des fêtes organisées par les fils de riches sur les yachts de papa. Par ailleurs, il nous indique quelques mouillages à faire et surtout nous invite à nous arrêter aux Aves avant de rejoindre Bonaire. Les filles reviennent de Gran Roque à la nuit tombante, les bras chargés de victuailles fraîches pour les prochains jours. On est prêts à bouger !
Crasqui
Dimanche matin, nous partons pour Crasqui en début de matinée pour 2 heures de navigation au portant, sous génois seul, par fainéantise et aussi car le vent souffle suffisamment fort pour nous pousser vers Crasqui. Nous longeons puis contournons cette longue île de sable avant d’aller nous ancrer sous son vent, où bon nous semble. En effet, il n’y a aucun bateau ici et la plage est incroyablement longue. À terre, il n’y a juste que quelques baraques en tôles de pécheurs et les restes en béton d’un projet d’hôtel abandonné. Avec Daphné et Laurent, nous profitons du vent bien établi pour aller gonfler nos kites sur la plage et découvrir cet immense plan d’eau que nous avons juste pour nous. L’île crée une bonne dévente et la mise à l’eau n’est pas évidente. Par contre, dès que nous nous éloignons un peu de l’île et de son ombre, le vent est plus fort que nous pensions. Nous entamons tous les 3 une grande remontée au vent pour trouver moins de clapot ou encore aller se balader au-dessus des massifs de coraux qui sont nombreux ici. Je n’ai pas le temps de prévenir Daphné qui redescend le vent en lançant des beaux gros sauts : je voulais lui proposer de faire le tour de l’île. Tant pis, j’irai seul. Je passe donc de l’autre côté de l’île qui offre une belle lagune bordée de mangrove. Elle est trop déventée pour s’y aventurer en kite. Je continue donc à descendre dans une longue houle, largement surtoilé en tâchant de contrôler au mieux ma vitesse pour ne pas tomber ici, seul et proche de cette côte inhospitalière de corail mort. Il me faut ensuite remonter au vent jusqu’à notre mouillage. Je rentrerai complètement mort de cette session, mais bien satisfait de pouvoir faire des longues distances entre les îles et découvrir ainsi l’archipel sous un autre œil. En fin de journée, Daphné et moi partons pécher en annexe le long des récifs qui bordent la pointe de l’île que nous avons contournée en arrivant. Nous péchons à la traîne à quelques encablures du récif et rapidement, nous avons nos premières touches. Nous reviendrons avec des petits yellow tail snappers (Colas en français). Nous n’aurons même pas à les cuisiner car ce soir c’est « Restaurant Corail » : Ce sont les petites filles qui cuisinent et nous servent. Phoebé fait griller à la perfection les filets de poisson et des petits légumes. Le riz est aussi très bien cuit. On est impressionnés. Éléa aussi se prend bien au jeu de la serveuse. C’est trop drôle…et agréable d’être servis comme au restaurant !
Lundi matin, le ciel est gris et le vent a monté d’un cran : Il y a 25 nœuds bien établis et nous ne sommes pas confortables à aller vers notre prochain mouillage, Noronsqui, qui est un lagon à l’entrée très étroite. Laurent, toujours le plus matinal quand on peut kiter, rentre complètement surtoilé lorsque nous finissons notre déjeuner. Je gonfle donc mon petit kite, le 8 m2 et part pour la session la plus venteuse que je n’ai jamais faite. Le vent monte largement au-delà de trente nœuds et je suis souvent en mode survie! Daphné prend la relève et s’amusera bien en bénéficiant d’une petite accalmie. Les conditions devenant plus maniables l’après-midi, nous kiterons une bonne partie de la journée, allant explorer les rives les plus éloignées du grand plan d’eau qui nous est offert. De temps en temps, nous croisons une tortue endormie ou nous faisons bombarder par un banc de petits poissons volants. En kite nous pouvons nous approcher des iles complètement vierges situées dans la zone protégée et interdite à la navigation. Nous découvrons ici que le kite peut être un super engin pour découvrir des espaces inaccessibles à la navigation en bateau…surtout que maintenant nous savons partir du bateau et y revenir.
Noronsqui
Mardi matin, le temps est revenu au beau fixe et les alizés sont plus modérés. Nous partons sous voiles pour couvrir les 4 petits miles qui nous séparent de Noronsqui. L’endroit a l’air super attirant sur le papier : C’est un lagon quasiment entièrement fermé bordé de longs îlots de sable et d’une belle barrière de corail. En arrivant, nous aurons un peu de mal à nous ancrer car les fonds restent profonds sur toute la superficie du lagon. Du coup, en étant seulement 2 bateaux, nous sommes un peu proches. Les conditions de kite nous décevrons aussi car le vent est très perturbé par l’île principale de Noronsqui et souffle en rafales. Nous abandonnons tour à tour, tannés d’être complètement sur ou sous-toilé. Dans ces cas-là, le backgammon ou le macramé restent des valeurs sûres ! Le vent reste fort mais Pauline et moi sommes très motivés à aller pêcher, certainement encouragés par le petit succès que nous avons eu avec Daphné à Crasqui. La sortie de pèche tournera court… et au ridicule : Poussés par le vent sur le récif où la vague déferle un peu, nous accrochons nos leurres dans les coraux et je m’aperçois un peu tard que Pauline ne sait pas (ou plus) se servir d’un moulinet. Ce qui devait arriver arriva: Le fil de pèche bloque l’hélice du hors-bord et nous dérivons rapidement sur la côte hérissée de corail mort. Je n’ai d’autre choix que de tout couper pour dégager au plus vite le fil de l’hélice. Ouf, ça repart! Il était temps. Nous rions de notre mésaventure qui illustre bien comment on peut rapidement se mettre dans un mauvais pas en bateau. Il en aurait suffi de peu pour que nous nous retrouvions sur la caye avec certainement les pieds blessés et l’annexe crevée. Pas de poisson ce soir au souper mais on a bien rit…de nous. Le vent continue de monter et la vague passe désormais allègrement au-dessus de la barrière de corail qui nous protège sur tribord. Comme Maïa est juste derrière, nous alternerons les veilles quasiment toute la nuit sur les 2 bateaux. Pas super….Le lendemain matin, nous ne serons pas déçus de quitter ce mouillage qui doit être très beau par temps calme mais à déconseiller quand le vent dépasse les 20 nœuds. En effet, il y a de très beaux massifs de coraux qui auraient été très intéressants d’explorer en apnée. Aujourd’hui, la houle déferle sur le corail, ce n’est pas le moment d’aller regarder les petits poissons….
Cayo Carenero
Tout comme la veille, nous partons poussés par un bon alizé qui nous emmène rapidement à Carenero. Seuls 9 petits miles à parcourir au milieu des innombrables ilots de l’archipel. Sans carte, les Roques sont un véritable labyrinthe car la superposition de petites iles de sable sur l’horizon donnent toujours l’impression d’une bande continue de terre. En réalité, c’est un dédale de hauts fonds et de petites iles. Pourtant, si l’on reste dans la zone navigable de l’île par temps ensoleillé, la navigation n’est pas difficile. En effet, comme nous l’avions déjà constaté à Francisqui, les fonds tombent très vite. Par conséquent les différences de couleur d’eau sont nettes. Cayo Carenero est constituée de 3 îles qui renferment 2 beaux lagons. Nous mouillons dans le premier, le plus petit situé au Sud-Est de Cayo Carenero. L’eau y est superbe, entièrement cernée de mangrove et les profondeurs raisonnables. Cela en fait un mouillage idéal surtout que nous sommes seuls ici encore. Si nous avions connu la qualité de ce mouillage, nous serions venus ici attendre le passage de Matthew. Cayo Carenero offre de belles plages sur le lagon mais aussi sur ses rivages extérieurs au Nord. C’est d’ailleurs là, entre les 2 îles principales que nous trouverons un magnifique spot de plongée et de kite. 2 en 1 ! On y accède par une plage minuscule surplombée par un mini-cimetière dont les tombes sont faites en lambis. Une petite statue de la Vierge surveille le tout. Ce doit être le lieu de repos éternel des quelques pécheurs de l’île, une poignée d’hommes qui vivent ici dans des cases rudimentaires. Le règlement les autorise à pécher et vendre le poisson pris à la ligne et les langoustes. Nous leur achèterons des langoustes puis le lendemain, nous échangerons un beau poisson péché au harpon contre 2 paquets de cigarettes. Le jour de notre arrivée, le vent est léger et Laurent ne fera qu’un bord ou 2 à l’intérieur du lagon. Voyant cela, nous décidons d’aller voir de l’autre côté de l’île, sur la côte au vent. Le vent est un peu plus fort et suffisant selon moi pour kiter. Par contre, l’endroit n’est pas très accueillant pour gonfler le kite, il y a des épineux partout. Une fois parti, il me faut trouver une solution pour sortir de ce petit lagon, fermé par une barrière de corail qui émerge un peu. Le vent n’est pas assez fort pour me permettre de la sauter et je profite d’une vague pour passer dessus. Ouf ! Je pars vers la prochaine île qui est une réserve. Après la traversée dans un bras de mer d’environ 2 ou 3 miles nautiques, je me balade un peu le long de la plage de cette île sauvage où les oiseaux sont nombreux. Je ne traîne pas car c’est la fin de journée et le vent est léger…Je reviens à Carenero au vent de mon point de départ et découvre un magnifique tombant de corail suivi d’une longue « plaine de sable »peuplée de grosses patates de corail. Un véritable jardin. Demain, nous reviendrons ici, c’est sûr pour le kite ou le snorkeling. Le lendemain matin, je commence la journée par un cours de mécanique à Pauline et Plume. Elles sont super contentes de savoir enfin comment fonctionne un moteur et les principaux points d’attention sur un moteur de bateau. Le vent s’installe tranquillement en début d’après-midi et nous partons tour à tour sur l’eau. Pas de plage, il faut gonfler le kite sur un petit banc de sable et attacher les lignes à moitié dans l’eau. Pas facile mais heureusement, nous sommes nombreux. Ce sera une merveilleuse session en alternant les sorties en mer et les allers-retours dans le lagon, dans moins de deux mètres d’eau translucide au-dessus corail. C’est magique. Laurent et Michal ont filmé et il y a aura peut-être un jour un vidéo de cette session. Nous restons jusqu’au coucher du soleil, profitant alors des riches couleurs du soleil sur la mangrove et l’eau du lagon. Plume et Pauline sont allées explorer la barrière de corail et ses environs qui, à les entendre, est aussi riche en poissons qu’en corail. Le lendemain matin, avant de partir pour Cayo de Agua, Daphné, Michal et moi partons finalement découvrir la barrière de corail en snorkeling. On nage tout d’abord dans une one peu profonde, moins de 2 mètres qui est un dédale de corail dans lequel on trouve une multitude de poissons de coraux dont des poissons perroquet géants. On passe ensuite par-dessus la barrière et on découvre le tombant. On aimerait avoir 2 équipements de plongée et descendre plus bas. Comme souvent, nous sommes parfois escortés par un barracuda. Il n’y a aucune comparaison entre les Roques et le reste des Antilles en termes de santé du corail et quantité de poissons. L’impact de l’homme sur la santé des fonds marins saute aux yeux. Vous trouverez quelques images dans la vidéo située plus bas. On lève l’ancre en fin de matinée sous un soleil de plomb et pas un brin de vent. Il fait une chaleur incroyable.
Les Photos
Cayo de Agua
Nous arrivons à notre mouillage après 2h30 de moteur à crever de chaud. Nous ancrons dans une belle piscine, à proximité d’un beau massif de corail. Les photos que j’ai prises en montant dans le mât parlent d’elles-mêmes. C’est une véritable carte postale de sable fin, eau turquoise, corail. C’est parfait…sauf quand il n’y a pas de vent et que la nuit arrive. Les moustiques nous envahissent alors que nous sommes assez loin des berges de l’île qui est tellement sèche qu’on se demande d’o1u sortent nos assaillants. Heureusement, sur Korrigan, nous avons les belles moustiquaires que Daphné nous avait faites avant de partir. Nous passons malgré tout une belle soirée tous ensembles. Le lendemain, l’absence de vent nous invite à aller explorer le corail et à profiter de la grande plage qui finit en un bel isthme de sable. Les filles s’amusent sans se lasser sur la plage, alternant jeux de sable et jeux d’eau. Pendant la journée, il vient des lanchas qui amènent des touristes pour la journée. Passé 15 heures, il n’y a plus personne. Le snorkeling sur le corail 1a côté du bateau est très beau et facile pour les enfants car nous sommes dans un ou deux mètres d’eau. Éléa revient bien impressionnée d’avoir vu un barracuda à côté d’elle et de Pauline.
Le vent se lève en fin d’après-midi et nous sauve partiellement des moustiques pour la soirée. En tout cas, ça sera moins pire que la veille. Le lendemain matin, nous sommes réveillés à 7 heures par un bruit d’eau à proximité du bateau. Je lève la tête de l’oreiller et regarde par le hublot de coque : C’est Laurent qui vient nous narguer en kite. Matinal, le bonhomme ! Le vent sera un peu inconstant le matin mais nous permet de nous balader sur ces eaux magnifiques. Nous interrompons notre session de kite du matin par une séance de recherche sous-marine : J’ai perdu la GoPro qui était attachée sur ma tête en faisant un backloop. C’est malin. J’ai assez bien repéré l’endroit et nous partons avec Pauline et Daphné en dinghy. Daphné nous jette tour à tour proche sur la zone de recherche. L’eau est très claire et Pauline la repère au bout de quelques minutes à proximité d’une belle raie. Malheureusement, la caméra aura filmé 25 minutes de sable et pas une image de la raie ! L’après-midi, Daphné et moi faisons une longue descente sous le vent jusqu’à l’isthme de sable que nous sautons en longeant la plage. C’est superbe et on est très chanceux de pouvoir partager ce genre d’expérience en pratiquant le même sport. Aux Roques, nous avons en fait inventé le « kite-tourisme » !
Nous partons à contrecœur de Cayo de Agua après y avoir passé seulement 2 jours et demi. C’est le genre d’endroit où on rêverait de rester au moins une semaine. En quittant les Roques, je les inscris à la suite de la Dominique et des Grenadines comme endroits où retourner.
Wow, excellent stuff!
Les sessions de kite donnent terriblement envie, comme d’habitude. Je me demande comment vous arrivez a gonfler le kite du bateau pour partir du bateau. Est ce que c’est ce que vous faites?
Et ne craignez vous pas un peu les barracudas lorsqu’ils vous accompagnent? il me semble que leur nageoirs peuvent etre tres coupantes s’ils vous frolent de trop pres. Est ce qu’ils sont agressifs?