Vents et conditions de navigation
Pendant la saison des alizés, en gros de Mai à Octobre, le vent souffle principalement du secteur Est ou Sud-Est. Les alizés sont moins forts dans le Pacifique que dans le Sud des Caraïbes, souvent aux alentours de 15 nœuds. Ils peuvent être ensuite renforcés par des phénomènes locaux comme les nuages ou plus étrangement, la différence de température de l’eau à proximité de la barrière de corail. Pendant cette saison, on peut compter aussi sur le mara’amu, ce vent froid et puissant qui souffle du Sud. pendant au moins une semaine lorsqu’il se réveille. L’anémomètre s’établit alors dans les 25-30 nœuds. Dans notre cas, nous avons eu plutôt un régime d’alizés pendant le premier mois, soufflant entre 12 et 22 nœuds. Ensuite, nous avons eu plusieurs passages de Mara’amu pendant chaque mois jusqu’en Octobre. Entre les coups de Mara’amu, nous avions alors soit des alizés légers, soit du beau grand calme. Au total, sur 4 mois, nous avons kité 60 jours sur environ 70 jours où les conditions permettaient de kiter.
En étant à l’intérieur du lagon sur la côte au vent, les spots sont donc tous offshore, c’est-à-dire que le vent pousse vers l’intérieur de l’atoll. Question sécurité, pas de soucis car il y a toujours une annexe à proximité. La barrière de corail et les bancs de sable garantissent un plan d’eau super plat, idéal pour la vitesse ou le freestyle. Évidemment, plus le vent est perpendiculaire à la barrière, plus le plan d’eau est plat. On prendra donc ce facteur en conséquence en fonction de la météo du moment, certains spots étant meilleurs pour le vent d’Est, d’autres pour le Sud-Est. Si l’eau passe au-dessus de la barrière de corail à marée haute, on peut s’attendre à rencontrer des veines de courant en face des entrées d’eau.
La chasse aux spots
En prenant en considération la direction du vent dominant, on cherchera donc des atolls présentant des côtes Sud-Est ou Est propices à la pratique du kite (et au mouillage du bateau transportant les kiteurs!) : Premièrement, on éliminera les atolls présentant des motus recouverts de végétation sur ces côtes (flèche rouge). Étonnamment, même si la végétation n’est pas très haute, cela est suffisant pour perturber le vent, le rendre moins constant. On cherchera ensuite des zones sableuses avec une faible densité de patates de corail, tant pour avoir une belle plage pour gonfler et poser le kite que pour faciliter l’ancrage du bateau et éviter de se blesser sur le corail en tombant (flèche verte). Évidemment, on peut rarement rassembler tous ces critères en un seul et même spot. C’est aussi ce qui rend la chasse intéressante… et sans fin!
Voici les spots sur lesquels nous avons kité et qui méritent d’être mentionnés :
Raroia ««
16 03.4900 S / 142 21.4700 W
Meilleures conditions : Sud-Est
Il y a peu de sable à Raroia, y compris sur les motus. On trouve principalement des plages de corail. Seul, un petit motu sur lequel subsistent 2 ou 3 palmiers offre une étendue de sable pour gonfler les kites et démarrer. Le plan d’eau est très plat avec de petits bancs de sable qui découvrent à marée basse. Dans les veines de courant, Oa en Tahitien, on trouve de magnifiques patates de corail dans une eau parfaitement cristalline.
A Raroia, nous découvrons la magie des spots sauvages, ceux que l’on trouve soi-même et où il n’y a personne d’autres : Nous sommes maximum 3 ou 4 sur une vaste étendue. Cela laisse de la place pour pratiquer tout ce qu’on veut et offre un beau terrain de jeu pour une remise en jambes après 5 mois sans kite. Ayant récupéré à proximité du spot des bouées de fermes perlières échouées sur la barrière, nous en avions utilisé 2 pour faire un parcours de slalom et pratiquer les jibes avec un down loop. Nous avons eu du vent assez léger, environ 15 nœuds, qui nous a offert 7 sessions en 10 jours. Prometteur !
Makemo «««
16 42.3075 S/ 143 27.7113 W
Meilleures conditions : Est à Sud-Est
Nous voulions plus de sable en quittant Raroia, nous avons été servis à Makemo. Nous avons déniché un magnifique motu de sable (le motu Napahere) à partir duquel s’étire une immense plage de sable. Ce banc de sable continue sur 8 kilomètres jusqu’à la pointe Nord-Est de l’atoll (voir photo). Cette longue bande de sable abrite une immense lagune et présente quelques ouvertures pour passer du lagon à la lagune. Il faut tout de même se méfier des patates de corail qui ne sont souvent pas loin sous la surface de l’eau. Outre de superbes conditions de navigation, ce spot présente l’avantage d’offrir un motu très agréable avec de l’ombre et une belle plage, appréciée des non kiteurs ou pour se reposer entre 2 sessions en buvant de l’eau de coco.
Lorsque le vent était bien établi au-dessus de 20 nœuds, j’ai fait, avec Jorge en windsurf, des runs de vitesse inoubliables. Sans une ride sur l’eau, dans moins d’un mètre d’eau, on passe la barre des 30 nœuds, au ras du sable. Sensations garanties ! Idem pour les sauts au-dessus du banc de sable, jeu super excitant auquel on devient accro jusqu’à se faire mal! Le spot est tellement grand que l’on peut être nombreux à naviguer sans se gêner. Nous y avons fait aussi quelques « longues distances » en tirant un grand bord jusqu’au bout de la lagune. Seule compagnie en chemin : les requins ! Avec 9 belles journées de kite à Makemo en 12 jours, Makemo restera un de nos coups de cœur aux Tuamotus.
Tahanea «««
16 56.0399 S/ 144 34.6281 W
Meilleures conditions : Est
À Tahanea, il faut choisir entre privilégier les conditions de kite et s’ancrer au niveau de la flèche orange ou la beauté du mouillage en allant mouiller dans la grande piscine de sable un peu plus au Sud. On a accès là-bas à de beaux motus sauvages (Tahanea est inhabitée). Les conditions de kite ne sont cependant pas idéales car le vent est très perturbé par les motus et le corail est à fleur d’eau à marée basse. C’est un spot de compromis si l’on est avec des non-kiteurs.
Le vrai spot de Tahanea se situe un peu plus au Nord, là où la barrière de corail est rigoureusement Nord-Sud, très étroite et sans végétation. Les conditions sur l’eau sont idéales car il n’y a pas de patates de corail dans la zone où l’on navigue. Par contre, il n’y a pas de sable du tout sur la barrière, ni même d’ombre. Il faut bien choisir son emplacement pour gonfler son kite et être très prudent en allant à l’eau car le corail est coupant. Nous nous y sommes tous blessés avant de repérer le meilleur endroit où aller à l’eau.
À Tahanea, nous n’étions plus tous seuls sur l’eau. Ce spot est fréquenté par plusieurs voyageurs-kiteurs, de passage pour une saison comme nous, ou y venant depuis plusieurs années, comme Adrien, talentueux kiteur et instructeur de kite. Phoebé et Émilie (11 et 9 ans) prendront avec lui leurs premiers cours de kite. Avec 10 jours de kite (sur 10 !) à Tahanea et un bon niveau sur le spot, nous progressons beaucoup. Il n’y a pas de secret, la régularité de la pratique, c’est payant.
Fakarava (Hirifa) «««
16 27.5637 S/ 145 22.5298 W
Meilleures conditions : Sud à Sud-Est
Le spot de kite est situé sur les bancs de sable qui s’étirent au Sud d’Hirifa. Leur configuration change rapidement : Le gros banc de sable sur lequel nous étions en Août était réduit à quelques mètres carrés à marée haute 2 mois plus tard. On se rend donc au spot en annexe, en venant du mouillage situé derrière le gros motu d’Hirifa, qui fait l’angle Sud-Est de l’atoll de Fakarava et protège bien les bateaux du vent de Sud à Est. Lorsque le vent est du secteur Sud à Sud-Est, les conditions sont idéales, le plan d’eau très plat et le vent parfaitement clair. Il n’y a aucune patate de corail dans l’eau et c’est ici que nous avons eu le moins de petites blessures reliées au corail. Le seul défaut est l’éloignement du motu. En y faisant un ou 2 aller-retours par jour, on vient rapidement à bout de nos réserves d’essence pour le dinghy. Par contre, les non-kiteurs apprécieront Hirifa et sa plage.
C’est certainement le spot de kite le plus connu des Tuamotus. C’est donc le spot où nous étions le plus nombreux (10 à 12 kiteurs), avec des niveaux très différents. Au total, nous aurons fait plus de 30 journées sur ce spot, principalement dans du vent soutenu, au-dessus de 20 nœuds. Alors que nous craignions le vent léger dans les Tuamotus, nous avons principalement kité avec nos petits kites (2/3 des sessions).
Le Team Tuamotus 2017
Notre tribu de kiteurs n’a cessé de s’agrandir tout au long de notre séjour dans les Tuamotus. Partis à 2 bateaux avec les Maïa, El Caracol se joint à nous à Makemo. Excellent planchiste, Jorge (El Caracol) succombe à la tentation du kite peu après notre rencontre. Contre du matériel de pêche, je lui échangerai mon ancien 12 m2 avec lequel il s’initiera. À Fakarava, nous ferons la connaissance du bateau Autrichien « L’Avenir » avec 3 kiteurs à bord, Bernard, Anne-Marie et Yan, leur fils de 15 ans. Nous resterons avec ces derniers jusqu’à notre départ des Tuamotus, Yan devenant vite membre de ce beau groupe d’enfants / adolescents, qui sont maintenant 8. À Fakarava, nous retrouverons Adrien et ferons la rencontre d’Antoine, actuel champion de France de Freestyle. Antoine est aussi talentueux et modeste qu’il est grand et costaud! Il ne se prend pas au sérieux mais partage facilement conseils et matériel qu’il met à la disposition de tous. En bonus, pendant nos pauses, lorsqu’Antoine, Adrien ou encore Rio Stevens (star Hawaïenne du surf et kite) sont sur l’eau, on a droit à un spectacle digne des plus beaux films de kite. Rio a un talent fou avec une planche de surf, sans footstraps qui semble lui coller au pied. Il nous donnera envie de recommencer à apprendre à kiter avec un surfboard (nous en avons un à bord depuis la Martinique). On fera rapidement des progrès, prenant goût à cette autre forme de pratique qui donne accès, plus tard, à la navigation dans les vagues. Tout cet environnement crée une bonne ambiance générale sur la plage comme sur l’eau. Avec Maya, Yan et maintenant Phoebe qui kitent, les adolescents sont de plus en plus souvent avec nous sur le spot. Évidemment, nous progressons beaucoup dans ce contexte, avec en plus une belle émulation entre Daphné et moi. Les front et back loops passent maintenant dans pleins de variantes, les sauts et raileys décollent sérieusement, atterris en switch stance ou non. Bref, on s’amuse et la liste des figures que nous essayons ne cessent de s’allonger. Voici en images quelques extraits de nos sessions dans les Tuamotus. Ne manquez pas les fails à la fin !!
Les cours de kite
Les conditions que l’on rencontre dans les Tuamotus sont idéales pour apprendre le kite : Plan d’eau plat et vaste, vent régulier, peu de monde sur l’eau. Les débutants pourront progresser rapidement dans ces conditions. Avec des amis comme Maya qui a appris le kite l’an passé à Bonaire ou Yan qui a déjà un excellent niveau à 15 ans, Phoebé était très motivée à apprendre le kite. Il n’y a, à ce jour, aucune infrastructure fixe pour apprendre dans les Tuamotus. Les instructeurs que l’on peut trouver sont itinérants, sur un bateau. C’est le cas d’Adrien qui donne des cours depuis 3 ans dans les Tuamotus. D’autres jumellent cette activité avec du kite-charter. C’est sur des spots connus comme Tahanea ou Fakarava que l’on aura le plus de chance de rencontrer un instructeur : Sur ces spots, il y avait assez de demande parmi les cruisers pour qu’Adrien donne 2 à 3 cours de 2 heures chaque jour. En règle générale, 10 à 15 heures de cours sont suffisants pour commencer à se débrouiller. Tout comme nous l’avions fait avec Daphné lorsque nous avons appris, Phoebe a partagé ses cours avec Émilie. On peut ainsi progresser plus vite en voyant les erreurs de l’autre et en écoutant donc le double de conseils de la part de l’instructeur. Elles sont tombées sur un excellent instructeur qui sait vraiment apprendre aux enfants, en jouant sans cesse avec eux. Le cours commençait par un service de navette sur sa planche. Tous les enfants y ont eu droit, avec en prime quelques sauts à 6 ou 7 mètres pour Éléa, la plus légère.
Le matériel
Dans les conditions dans lesquelles nous l’utilisons, le matériel de kite souffre beaucoup. Au début du voyage, nous pensions naïvement que notre matériel serait bon pour la durée du voyage. En réalité, avec les UVs super méchants sous les latitudes où nous naviguons et l’absence de rinçage à l’eau douce, la durée de vie d’un kite n’excède pas 2 saisons. Dans les Tuamotus, il faut ajouter aussi le corail, sur lequel le kite va inévitablement frotté. Même sur les plages ou bancs de sable, il y a toujours des petits morceaux de corail qui, à la longue, endommagent le matériel. Il est donc conseillé de venir dans les Tuamotus avec du matériel en bon état et des pièces de rechange (bord d’attaque, valves autocollantes, tuyaux de connexion, Dacron autocollant). Comme Daphné est bonne couturière, nous avons aussi du tissu de spi pour pouvoir réparer ou changer un panneau. Ainsi, nous avons changé les tuyaux qui relient le bord d’attaque aux lattes sur plusieurs kites, changé plusieurs valves cassées net après que les UVs les aient rendu jaunes et cassantes. Nous avons dû aussi changer le bord d’attaque de mon 8 m2 après que le tissu du bord d’attaque se soit déchiré sur la corne qui touche toujours lorsque l’on lève et atterrit le kite. Heureusement, avec le matériel de plusieurs bateaux et les talents de couturière de Daphné, nous nous sommes toujours dépannés. Le soleil et le sel ont aussi eu raison de nos harnais qui devront être changés avant la prochaine saison. Les planches ont aussi souffert du corail, heurtées accidentellement, mais aussi du sable à force de vouloir sauter trop proche du bord ou au-dessus des bancs de sable! Avec Laurent, nous referons la carre de ma planche en résine époxy. À Tahiti, le choix n’est pas énorme et les prix réellement prohibitifs. Nous avons donc fait presque tout de venir de France : Un petit kite (6 m2) pour Phoebé, 2 nouveaux harnais, une paire de footstraps, une nouvelle planche, quelques pièces de rechange. Avec tout ça, nous devrions être bons pour une autre ssaison dans le Pacifique.
C’est super beau tout çà !! Que de beaux spots et beaux corps sculptés.. Les fails sont « OUTCH » !! très amusant pour les voyeurs que nous sommes… et toutes ces rencontres sont tellement sympas. Et les filles sont assez grandes pour bien s’y mettre.
Superbe blog, merci, continue.
De La Buse où il neige assez pour que les arbres soient bien chargés ce matin..