La ferme perlière
La principale ressource économique des Tuamotus, outre le coprah, sont les perles de Tahiti. Comme leur nom ne l’indique pas, celles-ci sont essentiellement produites dans les Tuamotus et les Gambiers : Il y a bien quelques fermes perlières dans les îles de la Société mais bien souvent, leurs lagons ne s’y prêtent pas. Tous les lagons des Tuamotus ne sont pas favorables non plus à la culture des perles, certains ne sont pas assez profonds, d’autres ont trop d’entrées d’eau, etc. Parmi les 5 atolls que nous avons visités, seuls Raroia et Fakarava ont des fermes perlières. Raroia étant hors des sentiers touristiques et la ferme étant éloignée du village, celle-ci ne reçoit que peu de visiteurs et nous avons été bien accueillis par Gigi, la patronne Néo-Calédonienne qui gère des fermes perlières depuis plus de 30 ans.
Pendant une journée de travail ordinaire, des plongeurs polynésiens vont chercher les huîtres qui sont pendues en chapelets sur de grands câbles sous-marins, visibles à la surface grâce à des bouées. Les huîtres sont ensuite ramenées à la ferme pour être nettoyées, greffées ou récoltées.
Pour la récolte ou la greffe, les plongeurs vont détacher chaque huître et l’entrouvrir délicatement avant de la passer au greffeur. La plupart des greffeurs sont chinois ou japonais et viennent passer plusieurs mois à la ferme pour la récolte.
Les huîtres sont greffées pour la première fois vers 3 ans. On incise la poche de gonade et on y dépose un nucleus et un greffon. Le nucleus est une bille en coquillage que le greffon va recouvrir de nacre afin d’isoler ce corps étranger. Le greffon est un morceau de lèvre d’une huitre qui a été sacrifiée. Celle-ci est choisie pour la couleur de sa nacre qui est sécrétée par la lèvre. En effet, les perles de Tahiti ne sont pas toutes noires, les nuances peuvent être champagne, bleuté, rose, verte ou aubergine.
L’huître est ensuite rattachée à son chapelet et ramenée dans le lagon ou elle passera entre 1 an et 18 mois afin d’assurer une épaisse couche de nacre sur la perle. Pendant cette période, les huîtres sont nettoyées au karcher et vérifiées régulièrement afin d’assurer leur bonne santé.
Lors de la récolte, le greffeur récupère la perle qui a bien grossi. Si celle-ci est assez belle, l’huitre sera greffée à nouveau. Cette fois on choisira un nucleus de la taille de la perle qui a été récoltée. Ainsi, à chaque greffe, l’huître produit une perle de plus en plus grosse. Une même huitre peut être greffée entre 3 et 5 fois. Parfois dans les premiers jours suivant la greffe, l’huitre rejettera le nucleus. Dans ce cas, l’huitre est laissée dans l’eau car elle fabriquera tout de même un keshi – une « perle » de nacre pure souvent très biscornue.
Nous avons visité la ferme de Raroia en période de récolte, une journée de sur-greffe. Le travail était exécuté par 3 plongeurs et 3 greffeurs sous la surveillance de Gigi. Nous étions autant une attraction pour les greffeurs chinois – qui nous photographiaient avec leur téléphone- qu’ils l’étaient pour nous.
Malheureusement, nous n’avons pas pu y acheter de perles car ils ne font pas de vente directe au public. Par contre, Gigi nous a invités à prendre quelques jolies nacres en nous disant que c’était assez facile à sculpter et nous a même offert une belle nacre blanche, assez rare ici. Olivier, en discutant avec un plongeur, a réussi à échanger quelques perles contre un short de plage.
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La nacre
Merci Gigi, d’avoir piqué ma curiosité sur ce nouveau matériau artisanal! En repartant de Raroia, je suis déjà à pied d’œuvre même si ça me parait plus compliqué que ce qu’avait l’air de suggérer Gigi car la nacre est tout de même recouverte d’une épaisse couche de coquillage très dure. Heureusement, les navigations sont à rallonge entre les iles et armée d’une râpe à bois, je dégrossie patiemment l’épaisse couche de coquillage sur un morceau de nacre cassé à la va-vite à coup de marteau. Ça se fait bien, mais ça me prend des heures. On travaille avec les moyens du bord! Par la suite, je commence à sculpter mon premier hameçon à l’aide d’une perceuse et de petites limes diamantées.
En montrant le résultat de mon travail à Laurent de Maïa, le voilà intéressé, lui qui sculpte des petits objets en coco. Comme il est un peu plus outillé que nous, avec sa meuleuse, il peut débarrasser une nacre de sa couche de coquillage en 30 min alors qu’il m’avait fallu environ 6h pour un morceau de 2 cm2. Ça permet de garder son énergie pour la sculpture!
Nous voilà donc Olivier, Laurent et moi à sculpter divers hameçons, raies Manta, tortues, dauphins lors de nos temps libres. La nacre est un matériau très agréable à travailler car suffisamment dur pour le modeler mais pas trop pour pouvoir travailler à la main. La variété de couleurs dans les irisations est fascinante! Selon l’emplacement dans la nacre, l’objet peut aussi avoir une face blanche et une face foncée.
Au cours des mois suivants, nous avons découvert auprès des Polynésiens le secret pour les faire briller : Ils utilisent du « savon bleu », espèce d’argile dure utilisée pour les travaux de carrosserie et beaucoup d’huile de coude. Nous nous sommes aussi un peu outillés car nous travaillons uniquement avec une scie à métaux, des mini-limes aux diamants et du papier de verre : Le père Noel m’a apporté un multi-Dremel avec de nombreuses fraises et Olivier a eu une meuleuse!
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Chasse aux coquillages
J’ai toujours été attirée par les cowries (ou porcelaines en Français), certainement pour leur coté brillant et aussi sûrement parce que c’est la variété de coquillages la plus utilisée par les Africains pour décorer toutes sortes d’objets qui sont dans mes souvenirs d’enfance. Saviez-vous aussi que ce fut la première monnaie sans valeur intrinsèque utilisée par l’humanité?
Ce sont des coquillages que l’on trouve très peu ou pas dans les Caraïbes et vu que nous ne sommes pas encore passés sur le continent Africain, nous n’en n’avons pas croisés avant notre arrivée dans le Pacifique. Mes chasses aux coquillages ont commencé aux iles Perlas du Panama. Notre guide de croisière nous indiquait une plage où l’on trouve de gros cowries. On a sauté sur l’occasion et la récolte fut fructueuse. Enfin, je peux moi aussi utiliser des cowries pour décorer mes bijoux en macramé.
Aux Tuamotus, c’est la variété principale de coquillages que l’on trouve sur les plages. Quel bonheur! Je pense ne pas être allée me promener au bord de l’eau sans ramasser un ou 10 spécimens. Les El Caracol sont des collectionneurs de coquillages et Cat m’a prêté un livre pour parfaire ma connaissance des coquillages. Depuis, j’ai commencé moi aussi une petite collection de cowries. La plupart d’entre eux ont étés récoltés sur la plage, déjà morts, mais les plus beaux spécimens que j’ai aussi trouvé étaient vivants. En effet, une fois morts, les cowries perdent vite leur brillant et sont recouverts de corail s’ils restent sous l’eau. Il faut donc être assez chanceux pour en trouver un mort récemment, comme après un épisode de forte houle. Cependant, il faut aussi être assez chanceux pour en trouver un vivant car ceux-ci sont actifs la nuit. En journée, ils se cachent dans des petites cavités dans le corail où ils sont difficiles à repérer et à extraire. Il faut ensuite tuer et vider le cowry. Je vous passe les détails sordides, mais disons que ça se mérite!
En Polynésie, on trouve aussi des oursins crayons. Ils ne sont pas piquants du tout et ont de grosses épines de couleur que l’on peut utiliser en artisanat, soit en en coupant des tranches pour faire des perles, soit entières pour faire de belles suspensions ou des colliers. On ramasse les épines sur les plages coté récif ou on peut les trouver vivants sur le récif, là où les vagues cassent lorsque les conditions de mer le permettent. Ils sont mauves ou verts selon l’archipel.
On trouve aussi en Polynésie de nombreux cônes, très jolis mais dont il faut se méfier. En effet, la piqûre de certains, aussi petits et inoffensifs qu’ils semblent être, peut être mortelle.
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Macramé et artisanat
J’adore créer des petites choses et j’ai beaucoup d’intérêts et une grande patiente pour apprendre de nouvelles techniques artisanales. Dans ma vie terrienne, je faisais beaucoup de tricot et de crochet. Les tuques et les mitaines sont devenues un peu moins utiles dans notre vie en bateau sous les tropiques. Il me fallait donc autre chose. J’ai commencé le macramé suite à notre passage sur l’île de Graciosa aux Canaries. Une fille vendait des colliers et bracelets assez épatants en macramé. Ma curiosité était piquée. Dès la prochaine connexion internet, j’ai cherché des livres électroniques et des vidéos pour apprendre les différents nœuds. Ensuite, il a fallu trouver des fils (en polyester cirés) que je me suis faite livrés en Martinique 6 mois plus tard.
J’ai commencé par faire quelques bracelets avec des graines, mais aussi décorer les calebasses, ces gros fruits que l’on trouvait dans les Caraïbes. Pour cela, il faut graver la calebasse quand elle est encore verte, dans les 2 ou 3 jours suivant la cueillette. Ensuite, on la scie pour l’ouvrir et la vider de sa pulpe puis on attend quelques jours qu’elle sèche et prenne sa couleur finale, ensuite, le travail de macramé peut commencer.
Le micro-macramé est maintenant mon artisanat principal. Je fais essentiellement des bracelets, mais aussi quelques colliers, parures de chignons ou petits écussons… Je les orne de coquillages, perles variées et morceaux de nacres. Je les fabrique souvent pendant l’école, entre 2 explications ou consignes. J’en produis bien plus que je ne peux en porter alors j’en vends de temps en temps mais surtout je les offre contre des services rendus ou comme cadeaux.
Aux Tuamotus, mes amies Cat et Michal montraient beaucoup d’intérêt pour mes créations et désiraient grandement apprendre, alors, en après-midi, après les sessions de Kite, pendant que les garçons jouaient au Backgammon, on se retrouvait sur un bateau ou un autre pour que je leur apprenne les techniques et que l’on s’échange des idées créatives.
I love hearing of your travels! Beautiful macrame creations, Daphne.
Your adventure continues!
Best wishes to you all,
Carol