Namuka (16 au 19 Juillet)
Une fois n’est pas coutume depuis que nous naviguons à Fiji, le vent nous abandonne complètement le jour de notre départ de Susui. Nous avons attendu que la houle se calme et que le vent vienne sous un angle plus favorable mais finalement, celui-ci ne se lèvera pas de la journée. Après être allés rapidement faire quelques courses à Lomaloma grâce à la barque du village, nous quittons notre mouillage en compagnie de Renegade. Peu de temps après être sortis du lagon, alors que nous longeons encore la barrière de corail, nous attrapons un beau mahi-mahi. Pourtant nous n’allions pas très vite, car au moteur : Habituellement, ces poissons ne mordent que lorsque nous avançons à 6 ou 7 nœuds. En tout cas, ce poisson dont nous raffolons fera notre bonheur et s’ajoute au tableau de chasse de notre valeureux petit poulpe rose. À part pendant quelques heures où nous pouvons avancer un peu à la voile, nous ferons la grande majorité de ces 100 miles nautiques au moteur. Ennuyeux et bruyant. Nous arrivons dans la matinée à Namuka après avoir franchi la barrière de corail avec beaucoup de prudence. En effet, il n’y a pas ici de passe clairement définie dans la barrière mais seulement une portion où celle-ci est plus profonde. Nous rejoignons ensuite rapidement le mouillage qui est magnifique : Il s’agit d’une baie quasiment entièrement fermée, une vraie piscine où nous mouillons sur du sable dans 2 mètres d’eau. L’endroit est paradisiaque, complètement isolé. Les enfants des deux bateaux ne tardent pas à sauter à l’eau pour se retrouver et s’amuser en paddle board ou sur la plage. Il y a une belle émulation dans ce petit groupe de filles qui se motivent mutuellement à faire du sport : Natation, ramer sur le SUP, course sur la plage. Le reste du temps, pendant que les 2 grandes jouent ensemble de la guitare, les deux plus jeunes s’occupent de leurs Barbies. Nous arriverons même à les emmener deux fois snorkeler. Il faut dire que le lagon à proximité de la barrière est extraordinaire. L’eau y est extrêmement limpide et toutes les espèces de poissons sont surdimensionnées vis-à-vis de ce que l’on a vu jusqu’à présent. La limpidité de l’eau me joue des tours en chasse sous-marine, les poissons semblant toujours plus proches qu’ils ne paraissent. En effet, on voit à 15-20 mètres avec une netteté extraordinaire. Avec Robyn et Brian qui sont des vrais accros de la chasse et de la pêche (ils pêchent même en dinghy lorsqu’ils vont chasser !), nous chassons tous les jours et nous ne manquons pas de poisson. Si certains d’entre nous passent le plus clair de leur temps la tête sous l’eau, d’autres préfèrent les ballades à terre, comme Daphné, Jon et Allison d’Alicat qui feront une belle marche à travers l’île pour se rendre jusqu’au village. Si celui-ci est plein de mouches (comme notre mouillage d’ailleurs!), mais est très mignon, avec ses belles maisons aux formes arrondies. Ils y feront la connaissance d’une femme qui fabrique des tapas, comme nous avons déjà vu ailleurs en Polynésie : Le tapa est une sorte de « tissu » fait en réalité de l’écorce d’un arbre que l’on tape jusqu’à ce qu’elle devienne souple. Elle est ensuite peinte avec des motifs, souvent monochromes. Après 3 belles journées, nous levons l’ancre tôt le matin pour Fulanga, située à une trentaine de miles d’ici.
Les Photos
Fulanga (019 Juillet au 1er Août)
Cette fois-ci, nous bénéficions d’une belle brise pour naviguer. Nous laissons en arrière les deux autres bateaux qui veulent surfer avant de partir et nous devons naviguer au près serré pour rejoindre Fulanga. Malgré tout, c’est une belle navigation, rapide car nous sommes protégés de la houle par les îles. Seule petite anicroche, le boulon qui fixe le vérin du pilote automatique au secteur de barre casse d’un coup sec alors que nous étions un peu surtoilés : Il a tendance à se desserrer et j’ai négligé de le contrôler, mon habituelle vigilance pour ce genre de choses ayant été endormie par les navigations au moteur des dernières semaines. Daphné prend la barre pendant que je retrouve un boulon identique dans ma boîte à quincaillerie et en moins de 10 minutes, nous voilà repartis sous pilote. L’entrée dans le lagon de Fulanga sera aussi une exception à ce que nous avons connu jusqu’à présent dans les passes des îles Fiji : Ici, la passe est très étroite et longue, créant ainsi un courant de marée très fort auquel s’ajoute des vagues pyramidales, typiques des passes où le vent la houle et/ou le vent contredisent le courant de marée. La tension est grande lorsque nous embouquons la passe, la proue de Korrigan pointant tour à tour sur les récifs de gauche ou de droite, au gré des vagues qui nous malmènent. Nous aurions dû prévoir une arrivée à l’étale de marée, comme nous le faisions dans les Tuamotus.
Une fois cette épreuve franchie, nous atteignons un autre monde, calme et paradisiaque, celui du lagon de Fulanga. C’est une immense étendue d’eau turquoise, du fait de sa faible profondeur et du sable blanc qui en recouvre le fond, et parsemée d’innombrables et minuscules îlots couverts de verdure. Bref, c’est un peu comme la baie des îles de Vanua Balavu en puissance dix. Nous zigzaguons presqu’une heure dans ce merveilleux dédale d’îlots avant d’atteindre une longue langue de sable derrière laquelle nous nous ancrons (voir photo d’entête de l’article). Nos deux compagnons de voyage nous rejoignent rapidement et les enfants ne tardent pas à aller explorer la plage et y découvrir des piscines ou petites grottes qui se dévoilent à marée basse. C’est d’ailleurs le meilleur moment pour aller à terre car on peut rester à l’écart de la palmeraie qui fourmille de mouches de sable qui nous assaillent et nous suivent jusqu’au bateau! Le cours de yoga collectif qu’avait prévu Daphné sur la plage pour le lendemain se déroule donc sur le toit du catamaran Alicat. Incroyable mais nous pouvons pratiquer le yoga à 6 sur le rouf de ce beau bateau (un Nautitech Open 40 tout neuf).
Comme le veut l’usage aux Fiji, nous allons faire le sevu sevu au village voisin le lendemain matin de notre arrivée. Nous nous y rendons en annexe, non sans nous perdre dans le labyrinthe d’îlots du lagon. Cela semblait pourtant si simple sur la photo satellite! Le village est ensuite à vingt minutes d’une marche agréable dans la forêt. Si les maisons de tôles arrondies sont d’une extrême simplicité, l’ensemble est très beau, bien entretenu et parsemé de jolis arbres. Une fois l’offrande de kava effectuée, le député du chef du village, un colosse comme la majorité des Fidjiens, nous accueille les bras ouverts dans cette petite communauté et nous assigne une famille d’accueil. C’est la tradition dans ce village et cela permet de répartir de façon démocratique les petits cadeaux ou objets et denrées que les cruisers échangent contre des fruits et légumes avec les villageois. Pour nous, cela permet d’avoir un lien privilégié avec les locaux. Nous sommes accueillis par nos hôtes, Balé et son mari Alfred, autour d’une tasse de thé et une délicieuse part de gâteau. Nous repartirons avec deux beaux crabes que Alfred a péché dans la mangrove. Lorsque la météo le permet, nous retournons régulièrement au village où nous nous sentons tellement bien accueillis. Les échanges vont bon train entre villageois et cruisers. Il faut dire que sur cette île démunie d’épicerie, il faut être débrouillard pour se nourrir. Notre régime local sera constitué de papaye verte, fruit à pain et poisson. Les habitants de Fulanga vivent très simplement avec quelques cultures d’ignames, bananes, taro, sans réellement compter sur le bateau ravitailleur qui ne passe en théorie qu’une fois par mois, mais dans la réalité pas mal moins souvent. Ici, il n’y a même pas une voiture, un cheval ou une mule pour le transport. Tout est transporté à dos d’hommes ou, au mieux, en brouette. Même leur accès à l’immense ressource en poissons de la passe est limité car le village ne possède qu’une seule barque motorisée et l’essence est une denrée rare. Aussi, le meilleur ami d’Alfred et son fils seront très heureux lorsque je leur proposerai de venir chasser avec moi dans la passe et démontrerons leurs qualités de chasseur sous-marin en ramenant une quantité phénoménale de poisson qu’ils partageront de bon cœur avec nous. Nous avions entendu parler de la richesse de cette passe en coraux et poissons avant notre arrivée. Ce que nous y avons découvert était bien au-delà de nos espérances. Il faut certes synchroniser ses plongées avec l’étale de courant et on bénéficie alors d’une heure ou deux d’émerveillement sous-marin. Peu péchée et très riche à cause de ce fort courant, la passe recèle de coraux multicolores sur ses bords où l’on trouve une multitude de poissons perroquets gigantesques et peu effrayés par les prédateurs que nous sommes. Les prédateurs locaux, les requins, font aussi légion, dans le fond de la passe, tous comme les mérous et loches, d’une taille très respectable. Je multiplierai mes visites dans la passe, ramenant à chaque fois de plus belles prises, ma plus belle étant la dernière, un beau mérou d’environ 65 cm, tiré à une quinzaine de mètres de profondeur. Les filles m’accompagnent à plusieurs reprises. Lors de notre première expédition pour snorkeler le long du récif en famille, nous n’avons même pas à attendre de mettre la tête sous l’eau pour être émerveillés car nous sommes accueillis par une baleine qui passe à une vingtaine de mètres de nous. Le poisson devient la base de notre alimentation quotidienne et nos amis de Renegade nous feront découvrir une succulente recette de beignets de poisson roulés dans la coco râpée pour varier les plaisirs. Servis avec des frites de fruit à pain, ce fish & chips Fidjien est un véritable délice !
Les Photos
Au village, les femmes se réunissent tous les mardis pour tisser ensemble le pandanus, cette plante dont on fait sécher les feuilles afin de les tresser et confectionner des tapis. Les feuilles séchées sont triées, sélectionnées puis découper en longue bandelette de la bonne largeur pour l’usage prévu. Daphné passera une matinée à participer à cette activité et prendra vite le goût, comme vous pouvez vous en douter, à ce nouveau loisir créatif. Elle achète à bon prix un rouleau de feuilles de pandanus à une femme du village et la voilà à l’œuvre. Elle a déjà fabriqué des corbeilles et de beaux petits sacs, constitués de deux épaisseurs de pandanus de largeur différente. Superbes ! Les hommes, eux, s’avèrent être d’habiles sculpteurs, surtout lorsqu’on considère les outils rudimentaires qu’ils utilisent. Bref, vous l’aurez compris, sur le plan culturel et de la vie sous-marine, Fulanga est une superbe expérience où nous embrassons la vie simple des îles éloignées : Ramasser des cocos, les ouvrir, les râper et en tirer du lait pour cuisiner les poissons que l’on a chassés peut rapidement prendre une bonne partie de la journée mais apporte une satisfaction que l’on ne connait plus en Occident, tout au moins en ville.
Malheureusement, comme la perfection n’existe pas, Fulanga nous déçoit comme spot de kite, malgré ce que nous avions pu entendre à propos de cette magnifique langue de sable. C’est dommage car nos amis Néo-Zélandais de Silveray et leurs enfants kiteurs nous ont rejoints et nous ne pensons tous qu’à retrouver la belle ambiance des journées venteuses partagées aux Tonga l’an passé. Malheureusement, ce spot n’est vraiment pas idéal : Le vent y est très perturbé par les innombrables îles et il est tellement irrégulier que kiter ici est dans le meilleur des cas non plaisant et dans le pire, dangereux. Il faut aussi avouer que les alizés sont plutôt rares depuis plusieurs semaines et la météo est souvent perturbée. Lorsque le vent se présente à nouveau, nous essayons une plage de l’autre côté de l’île, en bas du village. Le vent y est plus clair mais le plan d’eau est rapidement clapoteux quand la marée monte. Pas super surtout lorsqu’on considère le trajet d’environ une heure en annexe et à pied dans la forêt avec le matériel. Par contre, une fois encore, nous sommes l’attraction de tous les enfants du village car l’école est située non loin de la plage. À chaque pause, on voit une cinquantaine d’enfants, tous en uniformes, débarquer sur la plage et profiter du spectacle.
Finalement, ce sont nos coffres vides de toute denrée de base et la lassitude envers une météo capricieuse et souvent pluvieuse qui nous chassera hors de Fulanga. Nous avons maintenant hâte de retrouver du temps plus sec au Sud de Fiji.
trop beaux ces poissons ! C’est dommage de les manger.
comme d’habitude vous nous faites rêver.
XXX
Super les tapas, super les poissons. C’est un bel endroit, et j’aime beaucoup les beaux arbres, les maisons et les iles bizarroides. Pour les poissons il nous faudrait l’echelle et ils ont tous l’air plutot plat. Ou est le merou? J’aurais bien aime voir un photos des sacs et corbeille tisses par Daphne. Et oui je m’en doutais qu’elle allait fabriquer quelque chose avec ces feuilles de pandanus – assez evident. et je suis sur que c’est aussi beau que ce qui est fait par les pros du pays.