Découverte du sud du lagon, l’îlot Mato
Nous quittons Nouméa le 12 Octobre, le bateau rempli des précieuses victuailles françaises que nous saurons apprécier dans les prochains mois lorsqu’il n’y aura peu ou pas d’endroits où s’approvisionner aux îles Marshalls, au beau milieu du Pacifique. Nous passons une dernière nuit à l’îlot Maître avant de mettre les voiles et tenter de rejoindre le sud du lagon, rendu inaccessible jusqu’à maintenant par de solides alizés. Une trêve dans les alizés nous permet d’avoir le vent… un peu moins dans le nez. Notre première destination n’est pas tout à fait définie, mais le but est de descendre le plus possible vers le Sud et d’y trouver un mouillage nous protégeant du vent d’Ouest annoncé. La navigation dans le lagon calédonien est moins facile qu’elle n’y paraît. En effet, celui-ci est de faible profondeur et encombré d’îlots et de récifs coralliens. Par conséquent, la mer est courte, freinant beaucoup l’avancée du bateau et les courants de marée importants. Le vent n’a pas tourné autant que prévu et c’est au près que nous descendons, passant à proximité du majestueux phare Amédée qui garde les passse de Boulari, empruntées par les gros navires marchands. Le vent nous est de plus en plus favorable mais varie beaucoup, augmentant une bonne partie de la matinée, pour tout à coup tomber complètement puis reprendre de plus belle. En début d’après-midi, notre objectif devient plus clair : Nous ne pourrons atteindre ni la grande baie de Prony, située sur la Grande-Terre, ni l’île d’Ouen car trop à notre vent. Par contre, l’îlot Mato, dont nous avons beaucoup entendu parler, nous semble très accessible avec ce vent. De nombreux récifs coralliens forment un plan d’eau très fermé autour de cette petite île et devraient former une excellente protection contre les vents de tous secteurs. Parfait pour les jours qui viennent. Moyennant quelques virements de bord entre les récifs de corail de plus en plus nombreux, nous arrivons dans l’après-midi devant la passe et pénétrons le plus loin possible dans ce petit lagon afin d’être bien protégé du vent d’Ouest qui se doit se lever le soir-même.
Excité à l’idée d’être enfin un peu loin de Nouméa, je vais explorer le lagon en apnée le lendemain matin, fusil à la main. Hélas, cet endroit semble lui aussi avoir été surpêché et les poissons sont rares… mais les requins très nombreux. J’attraperai malgré tout quelques poissons de taille modeste, dont une petite loche, dans un environnement plutôt stressant car les requins sont plutôt du genre curieux… et de plus en plus nombreux. La petite vidéo ci-dessous filmée après avoir vidé les poissons le prouve bien!
Nous irons passer l’après-midi sur l’île où nous rencontrons une charmante famille de Nouvelle-Calédonie venue passé quelques jours sur leur bateau dans le lagon. L’îlot Mato est infesté de tricots rayés, ces petits serpents vivant aussi bien sur terre que dans l’eau. Nous en retrouvons tout le long du chemin qui monte au sommet de l’île. De là-haut, la vue est magnifique et Korrigan semble perdu dans une palette de nuances de bleu. À perte de vue s’égrènent petits îlots de sable, récifs coralliens et zones plus profondes, créant un dégradé de toute beauté, allant du turquoise au bleu marine. Nous passons la soirée sur le bateau voisin, à déguster en apéro des clovis, coquillages assez proches de coques que l’on trouve enterré sous quelques centimètres de sable à marée basse.
Le surlendemain de notre arrivée, nous partons dès le matin pour continuer notre route vers l’île des Pins, craignant que le Alizés ne se mettent à nouveau à souffler et nous barrent la route vers cette mythique île. Nous traversons un véritable labyrinthe de corail où seules les images satellite peuvent nous guider. Il faut slalomer entre les massifs de corail et surtout faire face à un courant très changeant et pouvant être très fort lorsque la profondeur change brusquement. En combinant cela avec un vent, une fois n’est pas coutume, encore trop dans notre nez, nous abandonnons l’idée de rejoindre l’île des Pins dès aujourd’hui et obliquons vers l’îlot Ndo. Celui-ci offre un mouillage beaucoup moins confortable que le précédent et peu évident à ancrer : En effet, il est très étroit, entre deux hauts murs de corail entre lesquels la profondeur est importante. Nous parviendrons plus ou moins à nous ancrer correctement, sans quelques mésaventures, dont notre ligne de pêche qui s’enroule autour de l’arbre d’hélice. Il fallait bien que ça arrive une fois. Heureusement, j’arrive à démêler le tout assez rapidement en apnée et Daphné, en utilisant notre matériel de plongée sous-marine, retrouvera notre précieux leurre tout neuf que je venais d’acheter à Nouméa. L’îlot est très joli avec de très belles plages de sable très blanc et tout aussi infesté de tricots rayés que l’était l’îlot Mato. Par contre, le mouillage devient très inconfortable à marée haute, auquel s’ajoute le risque d’échouement sur le récif si le vent tourne quelque peu. Dans ce contexte, nous partons dès le lendemain matin pour l’île des Pins.
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L’île des Pins, baie de Kuto
Malgré l’inconfort du mouillage de l’îlot Ndo, nous avons bien fait de reporter d’une journée la navigation vers l’île des Pins. En effet, le vent a un peu tourné et nous pouvons effectuer cette navigation au vent travers, à vive allure. Pour rejoindre l’île des Pins, on quitte le lagon calédonien et parcourons un peu plus de 20 miles dans les eaux plus profondes de l’océan où nous attraperons un beau petit thon. En mi-journée, nous approchons de notre destination et longeons plusieurs îlots hérissés des fameux pins colonnaires si caractéristiques de l’île des Pins. Leur longue silhouette noire et décharnée contraste avec le bleu turquoise intense du lagon. L’arrivée dans la baie de Kuto est le clou du spectacle, vous en jugerez par vous-mêmes avec les photos dans l’album ci-dessous. Cette baie est vraiment splendide : La plage de cette baie très fermée forme un grand croissant de lune blanc surplombé de cocotiers et de pins colonnaires. La faible profondeur et le sable blanc confèrent à l’eau une couleur bleue éclatante dans laquelle on ne tarde pas à se jeter. Pendant plusieurs jours, nous profiterons de cette magnifique plage, même si cela n’est pas vraiment dans nos habitudes.
À terre, les alentours immédiats de la baie sont aussi très beaux, la route zigzagant sous une immense tonnelle formée par les longues branches tortueuses des arbres. La végétation est bien différente de celle de la grande-terre qui a été fortement déboisée. Une promenade sur la presqu’île de Kuto nous permet aussi de voir les vestiges du premier fort militaire établi par les français sur l’île au 19ième siécle.
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L’île des Pins, balade sur l’île et au mont Nga
Korrigan restera dans la baie de Kuto pendant quasiment tout notre séjour sur l’île des Pins car les autres mouillages ne nous sont pas forcément accessibles, non pas pour des questions nautiques mais plutôt à cause de l’ambiance tendue entre les tribus de l’île et les plaisanciers qui débarquent de Nouméa. Cette situation est assez symptomatique de l’ambiance qui règne en Nouvelle-Calédonie où les tensions entre les différentes communautés – Kanaks, Caldoches, Métropolitains et autres immigrants mélanésiens – sont palpables. Comme il nous est difficile d’avoir l’heure juste et de savoir sur quels mouillages nous sommes bienvenus ou non, le plus simple est de laisser le bateau dans la baie de Kuto, où se trouvent d’ailleurs tous les autres bateaux de passage, et se promener à pied. Ainsi, nous monterons au sommet de l’île, le pic Nga d’où la vue sur l’île, ses immenses forêts et le lagon est imprenable. À perte de vue se succèdent les îlots et les bancs de sable blanc. En redescendant, nous pourrons voir les vestiges du bagne. Certains sont conservés, d’autres ont été utilisés comme base de construction pour des habitations.
À la recherche d’une épicerie au village de Vao, nous tombons sur une belle expression de l’art local : Une statue du Christ qui surplombe la baie de Vao est entourée d’innombrables statues ou tikis calédoniens aux visages très expressifs. Ils sont très différents de ceux que nous avons pu voir en Polynésie et plutôt variés. Certains mêlent visage humains et animaux. Si notre quête de produits frais sera peu fructueuse, on aura au moins eu l’occasion de parler un peu avec des locaux qui nous semblent très gentils et accueillants.
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L’îlot Brosse
Depuis notre arrivée sur l’île des Pins, nous sommes à la recherche du bateau de Gaël, le neveu de Joël que nous avons rencontré à Nouméa. Nous sommes curieux de rencontrer cette famille de Français qui a réussi à s’installer et s’intégrer dans la communauté de l’île des Pins, si fermée. Après renseignements pris, nous les trouverons au mouillage de l’îlot Brosse, petite île située à quelques miles de la baie de Kuto. En se frayant un passage entre deux patates de corail, nous jetons l’ancre dans moins de deux mètres d’eau dans une belle piscine de sable blanc dans laquelle Korrigan semble léviter. Nous faisons connaissance de Gaël, Pauline et de leurs deux enfants avant de découvrir l’île. Dans la forêt se trouvent de nombreux campements aménagés par les habitants de l’île des Pins qui y amènent des touristes ou viennent y passer des weekends en famille ou entre amis. Les filles y feront une découverte incroyable : Des boules de pétanque! Ça les amuse beaucoup et nous passeront plusieurs heures à jouer à la pétanque entre les arbres, dans le sable et les racines, avec de bons fous-rires à la clé.
Une fois encore, je serai déçu par la vie sous-marine sur le récif avoisinant : Peu de poissons et le corail est en piètre condition. Cependant, avec Phoebé, nous y verrons deux immenses raies, avant de rapidement sortir, transis de froid. L’eau n’est vraiment pas chaude ici, en cette fin d’hiver.
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Le plus beau pour la fin: la Piscine
Le joyau de l’île des Pins pour les visiteurs est l’immense piscine naturelle située dans la baie d’Oro, au Nord-Est de l’île. Ce grand bassin de sable est situé à l’extrémité d’une rivière salée, c’est-à-dire un étroit bras de mer qui zigzague entre l’île de Pins et la presqu’île d’Oro, se vidant et se remplissant au gré des marées. On atteint la piscine en remontant la rivière salée à pied. Comme ailleurs sur l’île des Pins, l’eau est d’une transparence inouïe et la palette de couleur tout aussi belle avec les omniprésents pins colonnaires verts foncés et les fonds de sable blanc. Nous pique-niquons sur les abords de la piscine avant de nous y baigner longuement. La faible profondeur et le soleil qui tape fort chauffent l’eau à une température fort agréable que nous n’avons pas eu depuis notre arrivée en Nouvelle-Calédonie. Le cadre est tout simplement paradisiaque et c’est un véritable bonheur de se prélasser ici pour notre dernière journée en territoire Calédonien. En effet, nous prenons la mer tôt demain matin pour nous diriger vers les Vanuatu.
Une chouette rencontre avec une chouette famille ! Vraiment ravis de vous avoir rencontré à l’ilot Amédée et d’avoir partagé une soirée avec vous. Votre vie est inspirante.
N’hésitez pas à nous faire signe, si vous passez par le Sud de l’Australie (Attention ce n’est pas la même météo ^^)
Audrey et Thomas
Bravo pour votre courage et maitrise de la navigation, et un grand merci pour le partage de vos découvertes en récits qui immergent le lecteurs et vos images alléchantes
Bon vent!